Logiquement le diamètre de ces boulons est nettement inférieur à celui des perçages. Ils ne sont pas mécaniquement utiles à l'assemblage (hormis pour maintenir les éclisses).
Le jeu entre perçage et boulons autorise une certaine dilatation.
Mais si effectivement des désordres géométriques, ou de cheminement, sont présents, les boulons vont subir des contraintes.
Ceci pour éclairer un éclairage minime à la question : "pourquoi à la SNCF on ne fait pas comme dans le nucléaire ?"
Cher Monsieur, je rends hommage à vos connaissances en métallurgie et à votre brillante intervention, toutefois j'y mettrais un bémol de circonstance : pensez-vous que la SNCF des grandes années (1950-1990) était un cloaque rempli d'incapables et de débiles analphabètes ? Si c'est le cas vous vous trompez. Le système ferroviaire français a vu oeuvrer les meilleurs ingénieurs français et certainement aussi les meilleurs dans le monde, dans de nombreux domaines. La réussite du TGV n'est pas le fruit du hasard. Tout ce que vous citez sur la fatigue des structures acier est parfaitement connu depuis très longtemps, et la maîtrise du contact roue-rail par les gens de la SNCF (de l'époque) est quelque chose d'assez impressionnant, je vous assure. La documentation de référence disponible est (était ?) pléthorique.
Maintenant, peut-etre qu'en 2013 ces compétences ont été perdues, diluées, oubliées, ou déléguées au privé, c'est possible, mais on ne peut nier qu'elles aient été immenses par le passé.
Concernant l'analyse du bout de rail cassé, la boulonnerie est presque anecdotique dans la tenue de l'ensemble ballast-traverse-semelle-tirefond-attache-éclisse, tant cet ensemble doit etre conçu dans une grande harmonie. La boulonnerie est d'ailleurs surdimensionnée au regard des sollicitations dynamiques et de l'endurance cyclique.
Par ailleurs, au jité d'antenne-2 de ce soir, le "reporter de guerre" en direct de la gare st lazare a annoncé que les enquêteurs envisageaient aussi que l'éclisse ne soit pas la cause initiale de l'évènement, mais un élément de l'enchaînement.
Ce qui pourrait signifier, par exemple, qu'une pièce traînante eut heurté l'éclisse, ou tout autre scénario.
Certains ici ont souligné que deux disques de freins des voitures sont manquants, toutefois ces disques sont situés sur des roues gauche, et l'éclisse défaillante est à droite.
Cher Monsieur Lavau, vous semblez omettre dans votre approche épistémologique du sujet qu'on ne conçoit pas de la même façon un aéronef croisant à mach 2 dans la haute atmosphère et un chemin de fer à vocation de service public permettant à des convois de rouler à 160 km/h sur le "plancher des vaches". Fort heureusement on ne fixe toujours pas les éléments de voie avec de l'inox 416 matricé à chaud avec congés de raccordement et recuit de relaxation, même sur le TGV.
Les contraintes de conception sont différentes, ce qui n'empêche pas les ingénieurs de l'un ou l'autre domaine d'avoir des compétences très poussées en la matière.
la deuxième photo montre la tête des 2 boulons cisaillés, on s'aperçoit (couleur différente pour les traits) qu'une partie est plus sombre, cela semblerait indiquer qu'une fissuration en fatigue (ancienne) a existé. Une demi-section seulement devait tenir si on en croit la couleur métal, claire qui correspond à la rupture récente (on retrouve cet aspect pour les deux têtes).
On constate aussi sur l'arête supérieure de l'éclisse Ouest, un martellement par le bas du champignon du rail de coeur. L'angle de la prise de vue ne permet pas d'apprécier l'ancienneté de ce martellement, s'il est ancien, ou juste lors de l'accident.
c'est le coeur de sortie de la TJD (le croisement) qui a été défoncé par les essieux qui lui sont tombés dessus.En ce cas, la photo est prise depuis l'ouest.
Au risque de me faire « flinguer », voilà comment sur ce brouillon, j’imagine ce qui s’est passé.
(http://www.cheminots.net/forum/index.php?app=core&module=attach§ion=attach&attach_rel_module=post&attach_id=32901)
BRÉTIGNY, CONTRIBUTION
(http://web.lerelaisinternet.com/railway/images/BRET1.jpg)
Dans cette histoire, tout est étrange, je ne prend pas position, j'essaye de réfléchir. Ces clichés ont été publiés par RFF/SNCF.
1 - Boulons pour éclisse de coeur de TJD usagés, rouillés, mais laissés sur place. Il traîne beaucoup trop d'objets sur les voies, ils deviennent des projectiles potentiels pour la caillera.
2 - 3 Les gens qui sont arrivés sur place ne sont pas des policiers mais des agents SNCF de l'Infra.
4 - L'éclisse externe est verticale, déplacée de plus de sa longueur, elle aurait dû tomber à cheval sous le joint 7.
5 - Traces de peinture rouge (ou de produit pour déceler les fissures) ?
6- Boulon à tête cassée. La cassure est brillante, elle n'a pas rouillé. A noter que la "scène de crime" n'a pas été sécurisée et immobilisée, ce qui est une grave faute, les objets ayant été déplacés et saisis à la main pour les poser sur un rail.
8 - La tête du boulon est également "cassée" net.
9- Le fût du boulon n'est pas tordu, il porte en brillant la trace de l'âme du rail due aux vibrations de cet appareil parcouru par des centaines d'essieux par jour, à VL 150km/h.
10- Son filetage est brillant, puis porte des traces de graisse (mise au montage pour faciliter le démontage), puis rouillé. Il ne s'est donc pas dévissé progressivement.
Comme la tête est cassée, il devrait encore porter son écrou et une rondelle. C'est ce point qui laisse à penser que les écrous n'étaient plus présents lors du choc.
11 - 12 Les portées des rondelles sont partiellement brillantes, les trous ne sont pas rouillés, la théorie du dévissage progressif ne tient pas, car le métal aurait rouillé.
13 - Ce boulon est neuf et intact, mais la photo ne montre pas si l'écrou était dessus.
(http://web.lerelaisinternet.com/railway/images/BRET2.jpg)
1 - Un écrou à la portée non rouillée traîne bien à plat sur la traverse et serait passé par dessus les rails. Peu crédible.
2 - Douille, trace de peinture jaune. Il n'y a pas de trace de peinture rouge sur ce cliché.
3 - L'éclisse coincée a une disposition qui renvoie l'essieu vers l'intérieur, or la plaque de garde (4) en face qui guide la roue n'est pratiquement pas abîmée .
Le déraillement est dû à un essieu ou un bogie qui s'est pris en bi-voie dans l'aiguille suivante. Il est fort possible que le déraillement n'ait pas pour origine cette TJD, même si cela n'a pas dû arranger la situation. Rappelons que le même jour un antinucléaire a démonté une éclisse sur une voie du côté de Limoges (...) qui mène à une ancienne mine d'uranium qui sert de poubelle à AREVA, et a fait dérailler la locomotive.
5, 6, 7 - Les portées des têtes carrées des boulons sont brillantes, il est rigoureusement impossible qu'elles se soient desserrées progressivement, elles auraient rouillé.
De plus l'équipe d'INFRA qui faisait l'entretien a bien serré les écrous. L'éclisse est déplacée de plus que sa longueur et est à plat (pas dans la même position que le cliché précédent). Pas facile de déterminer si elle a effectué une translation (comment ?) ou une rotation autour du trou 5.
8 - Cette portée de boulon est moins brillante.
9 - Cet écrou a une portée brillante, son boulon est en dessous (10). L'écrou est à l'opposé de sa position normale par rapport au rail.
Pas trace d'une rondelle de blocage.
11 - Vieux boulon muni d'un écrou, on revisse, mais on ne ramasse pas.
Par où est passée la voiture 4 en considérant les dégâts sous le châssis et elle est bien cabossée sur son flanc gauche(sens de marche) voiture4.jpg
(http://www.cheminots.net/forum/index.php?app=core&module=attach§ion=attach&attach_rel_module=post&attach_id=32905)
CiterLes connexions électriques manquantes ne concernent aucunement le circuit de voie (signalisation occupation des zones ou cantons) même si le circuit de voie les prend en compte...
C'est le retour courant de traction... Les coupons de rail étaient tellement proches que celui -ci devait être encore bon... Par contre, j'espère pour les derniers visiteurs qu'ils ont noté ce détail dans leur compte rendu, sinon...
Alors j'ai fait quelques recherches, et cette connexion doit etre doublée sur ligne 1500V, en 95mm² mini, l'intensité est trop forte pour passer dans les bouts de rail (ça pourrait s'autosouder par étincelage). Et justement je n'ai pas trouvé d'autre exemple d'une TJD sans ces connexions (1 seule en 25kV, 2 en 1,5kV). Il y a un loup autour de ça. Cette aiguille a t'elle été démontée récemment ?
Il y a bien un autre câblage qui relie la pointe de l'aiguille, mais règlementairement il n'est pas suffisant.
A mon avis, pour mieux comprendre,il faudrait faire une tournée à pied de 10 km en 4 heures en plein soleil de juillet avec un agent de l'infra, sur des voies circulées à 150 km/h, avec un seul annonceur, pour comprendre qu'on ne peut malheureusement pas voir tous les défauts.
Il manque à l'agent de l'infra le don d'ubiquité ! Le manque de moyens et la perte de technicité sont les conséquences d'une gestion comptable catastrophique depuis la création de RFF...
Si il n'y avait pas eu retour de courant, j'imagine que le différentiel de la sous sta (si il y en a...) aurait vu une différence... Donc, pour moi, ces connexions manquantes ne sont pas trop graves mais elles doivent être signalées le plus tôt possible pour éviter les mauvaises surprises qui surviennent généralement aux pires moments (loi de Murphy)...
J'espère donc qu'elles ont été signalées lors des dernières tournées terrain...
Ce que je veux dire par là, c'est que l'absence de cette connexion évoque un démontage récent de l'aiguille, et peut-etre une intervention qu'il convient d'analyser en détail.
CiterVous aurez remarqué que les "tétons" (je les appèle ainsi faute de me souvenir du bon terme technique) sont absents sur le rail correspondant : cassés?
C'est vrai et pour le moins surprenant. Il y a peut-être eu un remplacement de rail récent coté aiguillage ? Si elles étaient absentes (pas de soudure) les connexions auraient du être remplacées par des connexions provisoires (mais je ne sais pas si elles y sont).
Les tétons ont été meulés proprement, on distingue encore la trace.
Ce rail peut avoir une grande importance, car son attache semble avoir bougé (tirefond, rondelles, semelle du rail).
... je pense que la SNCF a encore suffisamment d'excellents ingénieurs pour avoir une idée précise de ce qui s'est passé (ou alors, ça devient vraiment grave).
J'espère en tout cas que la SNCF, n'a pas besoin et n'attend pas les rapports BEATT et expertise judiciaire pour savoir ce qui a pu se passer.
En tout cas, l'inspection massive décrétée des pièces sensibles des TJD, TJS se fonde bien sur quelque chose (on inspecte bien en recherchant des désordres que l'on a identifiés précédemment comme pouvant engendrer telle ou telle conséquence, sinon on ne fait que du vent). Quand la SNCF détaille dans un des points presse la méthodologie de tournées dans les TJ (recherche de danse, etc.), c'est bien que l'on a une idée assez précise sur les modes de défaillances conduisant à la survenue d'un tel évènement ou alors ce n'est que de la com'.
dans vos calculs, prenez vous en compte l'amorce de rupture que constitue les derniers filetage prisonniers à l'intérieur du trou de l'éclisse?
Il manque la densité de l'air et la résistance aérodynamique du morceau de boulon pour que le calcul soit précis. Sachant que lors du passage du train, l'effet de souffle est assez conséquent, et les turbulences de l'air dans l'entrerail sont assez difficiles à modéliser.
Et la température à Brétigny le 12/07 ??
Puisque tu es impatient de calculer, je te suggère de t'exercer sur le défaut en lacet de la voie qui a fait péter trois boulons à 11 tonnes chacun (peut-être plus de 20 tonnes pour le boulon n° 4 ?), plus les forces de rappel du rail d'aiguille et du rail de coeur, dont les photos prouvent qu'il a salement morflé.
Courage ! Les supporters te regardent !
poncet, le 01 Aug 2013 - 09:21, a écrit:
Maintenant, je vais vous dire une chose déplaisante, et vous serez bien entendu libres de supprimer mon message. Cette histoire d'éclisse qui sort toute seule de son logement arrange tout le monde, parce qu'elle permet de dire que c'est la faute à pas de chance et donc de protéger tout le monde. La Direction a peut-être des informations que nous n'avons pas, et de "bonnes" raisons de ne pas les divulguer, et dans le doute nous avons tout intérêt à adhérer à cette théorie là. Voilà ce qui explique votre attitude, et non pas bien entendu les dessins d'enfant que j'ai vu dans les premières pages et qui peuvent sans doute convaincre le quidam, mais pas un cheminot.
Ce que je dis là n'est pas le point de vue de Poncet ; figurez-vous que j'en parle avec des collègues, aussi. Je ne sais pas ce qu'ils disent en public, mais entre nous personne ne croit à cette fable à dormir debout. Pour parvenir à casser ainsi au moins deux boulons, s'écarter suffisamment de l'âme pour contourner le champignon et atteindre au moins le plan tangent au boudin de la roue, l'éclisse a été violemment frappée par quelque chose. Racontez que la danse aurait pu suffire à cela si on vous le demande, mais ne vous intoxiquez pas vous-même avec une telle croyance (car si vous en arrivez à le croire vous-même c'est votre compétence qui en souffrira).
Frappée par une autre éclisse, par une pièce traînante ? Je n'en sais rien, et pour l'instant cela ne dit rien des responsabilités. Acte de malveillance ? Négligence de l'Equipement ? D'un sous-traitant ? Du Matériel ? Tout reste ouvert.
En revanche CERCL a raison d'invoquer une cause de forçage en lacet vers l'Ouest des champignons de ce rail Ouest. Et là, il n'y a pas besoin de chercher bien loin : une oscillation en lacet imposée par un défaut géométrique de la voie en amont, sur une à trois demi-longueurs d'onde, où selon la vitesse, la déformation de la voie envoie les roues et leurs boudins forcer sur ce joint, et cela depuis des années déjà. Cela correspond qualitativement au témoignage du conducteur du RER C : http://www.youtube.com/watch?v=Dyo_PUmNaIc . Les voies ont joué au dribble avec les bogies.
Licencié pour faute grave. Renseignez-vous.
Lavau, le 01 Aug 2013 - 23:16, a écrit:Citation de: LavauÇa été censuré depuis.Étant donné que je peux voir le contenu "censuré", il est très étonnant que je n'arrive pas à retrouver ce que vous affirmez.
Gom, le 01 Aug 2013 - 23:35, a écrit:
CiterÉtant donné que je peux voir le contenu "censuré", il est très étonnant que je n'arrive pas à retrouver ce que vous affirmez.Je l'ai lu ce message en question mais je ne le retrouve pas non plus.
Gom, le 01 Aug 2013 - 23:35, a écrit:CiterÉtant donné que je peux voir le contenu "censuré", il est très étonnant que je n'arrive pas à retrouver ce que vous affirmez.
Tu m'étonnes que tu le retrouves pas : Lavaud prend un fait, le transforme, le cite après transformation et te dis que la censure a frappé !
Le contenu réel le voici : " Il (le conducteur) s'est fait engueuler et menacer" et ça devient " il a été licencié".
Et de qui était l'information à la source ... Lavaud : http://www.cheminots.net/forum/topic/36383-deraillement-dun-train-intercites-a-bretigny-sur-orge-ou-les-elucubrations-de-pseudos-experts-ferroviaires/page-50#entry561673
Donc là y'en a plus que marre de se faire prendre pour des billes. On en discute en arrière boutique.
Lavau, le 31 Jul 2013 - 09:27, a écrit:CiterRemarque que déjà avant toi, au 16e siècle, Gargantua dans son enfance faisoit de l'asne pour avoir du bren.On retrouve bien là ,Jacques , dans cette énième intervention , tous les reproches qui vous sont fait sur la toile ! Non ?
Remarque que lui au moins cogneussoit mousches en laict, et on n'est pas sûrs que tu parviennes à en faire autant.
En développant encore un peu, tu pourrais faire concurrence à la plaidoirie du seigneur de Humevesne.
Des profondeurs de la galaxie Internet, nous arrive donc un nouvel emissaire, emprunt de nombreuses batailles, dont il fut le "malheureux et incompris instigateur..."
J'ai bien peur que l'orbite de la planete Cheminots.net ne soit guère plus acceuillante ... s'il vous reste encore quelques cristaux d'energie, je ne saurais trop vous conseiller de mettre le cap vers le plein espace, et vous souhaiter que le voyage vous soit conseilleur, pour un futur et calme acceuil quelque part ailleurs..
Fabrice
Lavau, le 01 Aug 2013 - 14:51, a écrit:
Justement il y a un p*t**n de problème de rectitude, de dressage vous avez sans doute voulu dire :Smiley_43:
dépassant la largeur d'un patin de rail autour de cette TJD. bah, un petit coup de 60mm de flèche ça doit passer inaperçu ^^
Ça part à gauche puis à droite. Sur celle de la voie 2 aussi, l'alignement est problématique.
super, enfin quelqu'un qui sait faire du contrôle de géométrie de la voie à partir de photos prises au téléobjectif
je vous embauche ! Vous allez me faire gagner un argent monstre !
rangez le Mauzin les gars, super Lavau arrrive !!!!!
La voie mal posée c'est comme un dallage mal posé, on peut facilement trébucher. Mais ce sont toujours les cordonniers les plus mal chaussés....
http://jacques.lavau.deonto-ethique.eu/Fleurs/graminee_dans_Dracaena.jpg
Durant ma carrière, je me souviens avoir vu en pleine voie une paire d’éclisses couchée de chaque côté du joint et les boulons cisaillés.
Je n’en croyais pas mes yeux et je pensais à un sabotage. Le chef de section nous a expliqué (ça avait été signalé par une tournée voie) que c’était explicable par le fait que les boulons s’étaient desserrés par les vibrations répétées, que les éclisses se sont écartées du rail jusqu’au moment où le boudin d’une roue a appuyé sur l’éclisse intérieure entrainant le cisaillement des boulons.
J’ai vu aussi des entretoises d’aiguilles desserrées qui empêchaient la bonne manœuvre de l’aiguillage.
Le sabotage n'est pas crédible.
Le croquis n'est pas au top
(http://www.cheminots.net/forum/index.php?app=core&module=attach§ion=attach&attach_rel_module=post&attach_id=32768)
Je reviens sur le déroulement ... en précisant.
Après le passage sur la demi-éclisse coincée dans la TJD (aiguille double), la rame partiellement déraillée passe une aiguille simple qui permet de passer de la voie 1 à la voie 3 à gauche.
Sur ce second appareil :
- la loco et les 5 premières voitures + le premier bogie de la voiture 6 empruntent la voie 1 en ligne droite comme prévu, mais les essieux déraillés dégradent l'aiguille.
- le second bogie de la voiture 6 et la voiture 7 bifurquent vers la voie 3
- la 6 est tirée en biais et en travers du quai 3 ; sous la contrainte des frottements et des chocs sur la 5 et la 6, l'attelage casse entre les voitures 4 et 5 qui se renversent, engageant la voie 2,
- le dernier bogie de la voiture 7 se retrouve sur les rails, voie 3. L'aiguille V1/V3 aura "rattrapé" ce bogie errant.
C'est le passage sur l'appareil V1/V3 qui a provoqué le plus de dommages et on en parle peu.
Sans ce bi-voie, la rame continuait tout droit comme à Busigny en 200...4 (?) avec des conséquences moindres.
Le coeur de sortie est très endommagé, ainsi que les traverses à proximité
(http://img11.hostingpics.net/pics/410911tjd2.jpg)
même si on est pas sûrs à 100% de l'antériorité de la rupture de l'about de rail, le type de fissure que l'on voit est bien connu, il s'agit d'une fissuration dite "étoilée" ou "en étoile" fréquente au niveau des perçages des abouts de rail. La couleur de la section de l'âme du rail semble montrer que ça ne datait pas d'hier. Contrairement à ce que tu indiques, la pleine barre n'est pas plus touché que le joint. Les sollicitations sont moins bien vécues à ce niveau en raison de la faible inertie du joint par rapport à la pleine barre et le fait que cela entraine (se combine) souvent avec de la danse.
Le joint est un point délicat de la maintenance et le LRS a apporté bien des avantages de ce point de vue (tenue du nivellement etc.)
CiterTintinGV, le 16 Jul 2013 - 09:20, a écrit:
=>comment peut-on contrôler la partie du rail située entre les 2 eclisses ????
Avec un appareil à ultrasons portatif.
Il permet de contrôler tout ce qui ne peut l'être par les moyens embarqués.
Il permet également de confirmer les caractéristiques des défauts détectés par les moyens embarqués.
Le contrôle US des rails et des abouts est quelque chose qui n'est pas pris à la légère.
Et en cas de doutes, les pièces sont systématiquement démontées pour pouvoir réaliser un contrôle visuel.
Je ne connais aucun CDT qui rigole avec les contrôles US. Car ce sont bien souvent eux qui mettent en évidence une fragilité interne du rails. Et les pièces sont remplacées avant d'avoir atteint le point de rupture.
En réponse à Tintin GV :
le contrôle par ultrason se pratique à grande échelle à partir de véhicules spécialisés ou tout simplement à petite échelle avec de petits appareils .
http://www.geismar.com/fr/mesure-electronique/196-filus-x17.html
C'est spécialement développé ( et cela existe depuis très longtemps ) pour effectuer le contrôle des abouts dans les joints . Ces derniers sont normalement tous contrôlés en voie principale à intervale régulier. Suivant ce qu'il ressort du contrôle, si défaut il y a , le joint est classé X n° tant , ce qui défini le degré d'urgence pour une intervention.
Les normes actuelles veulent aussi de nos jour qu'un rail amené à remplacé un autre soit passé aux US avant d'être posé. Ceci afin de s'assurer de ne pas mettre en voie un rail comportant des défauts.
Le rail de cœur est plus dur que le rail de voie courante.
Stéphane (prénom d’emprunt) est un riverain conducteur de train à la SNCF depuis 2000. Il travaille régulièrement sur la ligne Paris-Limoges et passe par Brétigny-sur-Orge, à l’endroit exact du déraillement de vendredi, qui a fait six morts et plusieurs blessés.
Samedi matin, il téléphone, la voix blanche. Il connaît bien les lieux et se montre persuadé que le problème vient de l’aiguillage. Il avait déjà noté des secousses à cet endroit.
Sans prétendre avoir la solution – plusieurs enquêtes sont en cours pour comprendre les causes du déraillement –, Stéphane a accepté d’expliquer à Rue89 les réflexions engagées avec ses collègues sur l’entretien des voies, l’état du réseau, la responsabilité des conducteurs. Camille Polloni
Chaque fois que je passe sur l’aiguillage de Brétigny, ça tape. Il y a un « clac » métallique très fort, et un mouvement de caisse symptomatique d’un souci sur la voie. Les passagers ne se rendent pas forcément compte de ce que ressent le conducteur, dans sa locomotive aux suspensions plus sèches.
« Taper », c’est exactement comme rouler dans un nid de poule de 10 centimètres en voiture, à 130 km/h sur l’autoroute. Ça fait le même effet. Quand on tape un sanglier, on le voit très bien. Mais une anomalie sur la voie ne se voit pas, on l’entend quand on passe dessus.
C’est à nous d’analyser si le choc est important ou pas, et d’agir en conséquence. Il existe une procédure d’urgence, « la protection d’obstacle », qu’on surnomme entre nous « le grand jeu ».
Le conducteur appuie sur un bouton dans sa cabine, le « signal d’alerte radio » (SAR). Il déclenche un signal sonore très particulier de 10 à 15 secondes, qui parvient à tous les trains dans un rayon de 5 à 10 km, voire plus. Tous les conducteurs qui l’entendent doivent arrêter leur train, sans réfléchir.
C’est ce qu’a fait le collègue de Brétigny, évitant ainsi une collision avec un train qui arrivait en face.
En même temps, on active le signal d’alerte lumineux (SAL), visible à 1 000 m en ligne droite. Les phares se mettent à clignoter, comme des warnings de voiture.
Une fois tous les trains arrêtés, seuls le conducteur en difficulté et le régulateur doivent parler dans la radio. Pour Brétigny, le régulateur travaille dans une grande pièce à Paris-Montparnasse. Le conducteur s’identifie et expose précisément son problème : un piéton qui traverse, un suicide, un gros animal (vache, cheval), un problème sur la voie.
Que les gars de la voie jettent un coup d’œil
Personnellement, en passant à Brétigny, je n’ai jamais signalé la secousse. Peut-être que d’autres collègues l’ont fait. Le risque est compliqué à prendre. Soit tu fais « le grand jeu », au risque de bloquer tout le trafic, soit tu ne fais rien. Il n’y a pas de demi-mesure.
On craint des remarques de notre chef en cas d’alerte inutile. Et surtout, mettre le doigt sur un problème c’est en porter la responsabilité ensuite, avec la judiciarisation croissante des accidents.
Il existe tout de même des moyens détournés de faire passer le mot, des habitudes. Les conducteurs de TER, quand ils arrivent à la gare suivante, peuvent prévenir l’agent :
« A tel endroit ça tape pas mal, ce serait bien que les gars de la voie jettent un coup d’œil. »
C’est du « off », de l’informel, personne ne l’écrit. On peut aussi appeler le régulateur sur son portable.
Nous, les conducteurs de trains, avons un bon niveau sur la sécurité. Mais pour ce qu’on croit être de petits incidents, on n’a plus envie de faire grand-chose : derrière, ce n’est pas suivi d’effets.
Avant la création de Réseau ferré de France (1997), la SNCF entretenait bien ses voies. Mais nous avons noté un tournant, à partir de 2003-2004, quand les deux entités ont entraîné deux chaînes de commandement et de contrôle.
Les effectifs des brigades, composées d’agents qui connaissent leurs lignes et entretiennent les voies au fur et à mesure, ont diminué. Certains m’ont raconté qu’ils passaient plus de temps à se transporter sur un chantier qu’à y travailler. Il y a moins d’interventions de nuit, pour retaper par-ci par-là.
Maintenant, on privilégie les « blancs travaux », c’est-à-dire la fermeture d’une ligne pendant un week-end pour changer les rails. Ces chantiers-là, auparavant pris en charge par « l’infra » de la SNCF, sont désormais gérés par des entreprises privées : Bouygues, Vinci et une cascade de sous-traitants.
Ces chantiers sont moins bien finis. Généralement, les cailloux de l’ancien ballast sont laissés au bord de la voie, en vrac. Les traverses aussi, dans les fossés. Les gars de la SNCF doivent refaire le boulot de nettoyage, enlever les pièces de métal qui traînent.
Le tunnel de Vierzon est dangereux
Petit à petit, l’état du réseau s’est détérioré. Sur la ligne Paris-Limoges, en dehors de Brétigny, j’ai souvent pensé que le tunnel de Vierzon était dangereux.
La voie n’est pas droite, elle a des bosses. Le tunnel « brasse » beaucoup. Quand tu entres dedans à 160 km/h, ça secoue dans tous les sens comme un cocotier. La cabine bouge à droite, à gauche, de haut en bas.
C’est comme si tu quittais l’autoroute à 160 km/h pour te retrouver sur une nationale de 30 ans d’âge. Alors au lieu d’entrer dans le tunnel à 160, on ralentit à 140 ou 130, parce qu’on sait que ça va secouer. On est un paquet à faire la même chose.
En banlieue parisienne, il y a beaucoup d’endroits où ça « brasse », à cause des tonnes de trains qui circulent. Comme pour une route, plus il y a de passage, plus la voie est déformée.
On se pose beaucoup de questions
Pour comprendre le déraillement de Brétigny, plusieurs hypothèses ont été évoquées. Avec les collègues de la voie, on se pose beaucoup de questions sur cet aiguillage.
Pourquoi quatre boulons se seraient-ils desserrés d’un coup ? Est-ce un acte de malveillance ? Cela nous semble très improbable. A 300 m de la gare, juste en face de l’aiguillage, il y a un poste occupé jour et nuit (en « trois-huit ») par quelqu’un qui surplombe les voies. Je ne vois pas comment, en pleine journée, quelqu’un serait venu mettre l’éclisse en travers sans qu’il s’en aperçoive.
L’autre possibilité est un mauvais serrage des boulons, un chantier mal fini. Ou bien, si le ballast s’affaisse, l’éclisse peut travailler de haut en bas, et les faire sauter. Ce sont des zones d’ombre, je n’ai pas la réponse. L’enquête du Bureau enquête accidents (BEA-TT) va déterminer ce qui s’est passé. Ils interrogeront tous ceux qui sont intervenus sur cette aiguille.
Mais pour nous, de toute façon, ce déraillement remet à l’ordre du jour la discussion sur le mauvais entretien général du réseau. Il fait un peu office de catharsis. Entre collègues, on en parle depuis deux ou trois ans. On se retrouve dans des foyers, on discute avec des agents de la voie, de la gare. Entre nous, on se disait : « Un jour, il y aura une catastrophe. » C’était une question de temps.
Au départ, on craignait un accident avec un train privé, parce que les conducteurs roulaient plus longtemps que nous, ce qui peut poser des problèmes de vigilance. Mais ça s’est assagi.
Restent ces voies, en mauvais état par endroits. Le niveau de sécurité dépend du prix que l’on veut bien y mettre.
« On craint des remarques de notre chef en cas d’alerte inutile. Et surtout, mettre le doigt sur un problème c’est en porter la responsabilité ensuite, avec la judiciarisation croissante des accidents.
! ! ! ...
Quelque chose m’échappe...Quand ça tape anormalement de façon répétée au même endroit de la voie, le conducteur en discute avec ses collègues et redoute vaguement un accident, mais il craint d’en parler à son chef de peur d’être accusé de fausse alerte, ou de porter la responsabilité au cas où personne n’interviendrait... ? !
Le conducteur devrait au contraire signaler les faits, et par écrit pour garder les preuves. Si rien n’est fait, la direction de la SNCF est de toute façon responsable.
Avec tout ce qu’ils encaissent, ils peuvent payer des techniciens de sécurité.
Bonjour à tous.
Je suis cheminot et travailles dans une grande gare française. Mon secteur est la maintenance des voies, mise en cause dans l’accident. Voici mon point de vue sur l’état du réseau actuel :
>>Il est bon de rappeler que chaque année, le trafic ferroviaire augmente. Or, en 30 ans la sncf est passée d’un effectif de 300000 à 160000 approximativement bien sûr. Ces réductions, si je les juge trop importantes ont plusieurs explications saines, la sous-traitance, l’utilisation de moyens mécanisés plus efficaces, et aussi le fait que 300000 cheminot, c’était un peu abusé.
>>Maintenant parlons de maintenance à proprement parlé, la pièce qui a lâchée, ce n’est pas un fait anodin, mais cela arrive tous les jours dans les grandes gares françaises. Lors de tournées de surveillance des voies, il n’est pas rare qu’on remplace une dizaine de ces pièces dans la journée... Elles cassent, se desserrent, sous l’effet des vibrations dues aux circulations. Le conducteur compare les voies aux autoroutes, mais pour faire un parallèle, un semi remorque pèse 33Tonnes, une locomotive à elle seule en pèse 80. Imaginez un train entier.
>>L’argent est distribué comme il suit dans la branche infrastructures de la SNCF : les investissement(TGV, Voie Nouvelles, gare nouvelles...), les travaux, la maintenance. En effet, la maintenance est le secteur qui rapporte le moins. Les 10000 embauches que fait la sncf par an ne compense pas 15000 départs à la retraite, de plus on embauche principalement aux guichets, ça au moins ça rapporte.
>>Les cheminots connaissent leur métier, après, on fait avec ce qu’on a. Par manque de moyen, on répare comme on peut. Plutôt que de faire des travaux couteux, on met des pansements...
>>Pour finir, je vous dirai que comme tout le temps, le nerf de la guerre conditionne tout. Et pour info, j’ai des collègue qui ne prennent pas le train car ils savent sur quoi ils roulent.
En espérant que cet accident réveille la direction.... car malheureusement nous on y arrive pas.
On en parle ensemble souvent.
Et souvent on fait des signalement par ecrit (en fin de journée on rempli toujours un « bulletin de service »).
Mais apres un signalement à un jour J, le temps de reponse est souvent très long, sauf incident lourd.
Merci Stéphane pour ce témoignage technique très intéressant.
Je le rapproche d’une réponse d’un de vos collègues, qui est actif sur la ligne Besançon-Morteau-La Chaux de Fonds (en Suisse). Je lui ai une fois demandé pourquoi avec un matériel roulant très moderne (X.73500 / 73900 si je ne fais erreur, sinon un matériel proche), donné à 140km/h (un grand autocollant de couleur vive dans la cabine) on roulait à une vitesse d’escargot : sa réponse à été fort simple : la voie est en ruine, si je roule plus vite on tombe dans le Doubs ! (que l’on longe pendant une partie du parcours).
Ajoutons que cette voie est laissée volontairement à l’abandon, et que les autorités politiques locales tant du côté français que suisse se battent continuellement pour son maintien !
Cordialement
Ce témoignage appelle quelques réflexions :
- Sur le signalement de l’aiguillage de Brétigny qui tape : avoir le choix entre l’alerte radio qui immobilise plusieurs trains au beau milieu d’un réseau saturé, ou espérer que le téléphone arabe remonte jusqu’aux bonnes oreilles, c’est quand même assez surprenant.
Pour avoir vu comment ça se passait sur le réseau métro de la RATP, si le conducteur s’aperçoit d’une anomalie quelconque sur les voies, la signalisation ou la structure des tunnels, il n’a qu’à prendre sa radio et contacter le centre de liaison de sa portion de ligne et reporter le problème à l’opérateur d’astreinte. Le centre de liaison demande ensuite aux conducteurs des rames suivantes de confirmer l’anomalie, et selon la gravité du problème, dépêche une équipe de l’infra sur les lieux ou inscrit le signalement à la liste des choses à inspecter par les équipes de maintenance de nuit.
- Sur la séparation SNCF/RFF : Christophe montre qu’on n’a pas attendu Brétigny pour se rendre compte que cette séparation a été bâclée et pose continuellement un paquet de problèmes à ces deux entités. Si la séparation, sous contrôle de l’État, entre un concessionnaire propriétaire du réseau et un exploitant locataire du réseau aurait pu être judicieuse afin de soulager la SNCF de prérogatives bien trop larges, il n’en a rien été.
Décidée sur injonction de Bruxelles qui ne supporte pas les monopoles naturels d’État, la création de RFF n’a eu pour autre but que de faire rouler des trains privés sur le rail français et en aucun cas simplifier l’organisation de la SNCF ; si bien qu’on arrive à la situation proprement absurde où l’exploitant - la SNCF - doit prendre en charge, en sus de la redevance qu’elle verse à RFF, l’entretien du réseau qui est normalement à la charge du propriétaire des voies - RFF. C’est comme si, en plus de m’acquitter du prix du péage qui me donne le droit d’utiliser une autoroute et inclut les coûts d’entretien, la société d’autoroute m’obligeait à venir reboucher les nids de poule et réparer les glissières de sécurité chaque weekend.
On comprend pourquoi un projet de fusion RFF-SNCF est dans les cartons, et ce malgré les contorsions de la Commission européenne...
- Sur l’état du réseau ferré français : il ne faut pas déduire de la catastrophe de Brétigny que tout est à jeter. Globalement en bon état dans l’ensemble comparativement à d’autres pays européens, ce dernier est toutefois marqué par un paradoxe.
Puisque l’argent va en priorité depuis les 25 dernières années au TGV, on se retrouve avec de superbes LGV rectilignes, clôturées, ultrasécurisées, bourrées de capteurs, constamment inspectées et desservies par des trains modernes, rapides et confortables. On a aussi par ricochet des grandes voies classiques en amont et/ou en aval d’une LGV en excellent état. J’en suis d’ailleurs le premier à m’en réjouir vu que j’utilise bien plus souvent le TGV que les Corail et autres TER.
Le revers de la médaille, c’est qu’on a mis des rustines partout ailleurs faute de moyens, y compris sur des grandes radiales comme Paris-Limoges. A ce titre, le choix du gouvernement est l’un des rares qui soit judicieux, il fallait réduire le flots de milliards alloués aux LGV pour mieux se concentrer sur la modernisation des lignes existantes.
J’ai travaillé pour ma boîte en maintenance, mais j’ai travaillé aussi pour des boîtes de sous-traitance, ou donné à faire.
Il n’y a pas photo on travaille toujours plus mal en sous-traitance parce que le budget est limité, le temps aussi, et que la boîte se démerdera seule après.
Et que les salariés à majorité sont insuffisament qualifiés, disons que travailler pour un sous-traitant est le moyen de se qualifier avant de se tirer.
Catastrophe de Brétigny : Ken Loach nous avait prévenus
Noël Mamère
Député de Gironde
Publié le 16/07/2013 à 10h40
La catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge est un drame partagé par tous les Français. Les six personnes décédées sont mortes parce qu’elles faisaient un geste banal : prendre leur train pour revenir du travail ou partir en vacances. Elles ont été piégées, prisonnières de wagons transformés en un amas de tôle.
Je tiens d’abord à m’incliner devant les victimes et leurs proches et à leur témoigner toute ma compassion. Mais, au-delà du respect que nous leur devons, ce choc doit nous interroger sur les causes qui ont provoqué un tel drame. L’enquête déterminera les responsabilités, mais les langues commencent à se délier sur les conditions d’exploitation actuelles de la SNCF, qui ne peuvent se réduire à une éclisse mal vissée.
En 2000, un film formidable du réalisateur anglais Ken Loach, « The Navigators », décrivait les réactions des cheminots à la privatisation de British Rail sous le gouvernement de John Major.
Bande-annonce VOSTFR de « The Navigators »
http://www.dailymotion.com/video/x9d2t9_the-navigators-bande-annonce-vost-f_shortfilms?start=97
Ken Loach, 2001
En effet, depuis cette privatisation, les chemins de fer anglais sont devenus dangereux, parce que le réseau est défectueux et que l’entretien des rails a décliné… Les mêmes causes produisant les mêmes effets, ce que l’on observe à la SNCF va dans le même sens : la dégradation continue des ressources humaines et matérielles du réseau.
Le « tout TGV » a forcé au « tout voiture »
Certes les Chemins de fer français ne sont pas encore privatisés, mais depuis deux décennies, sous l’impulsion de directives européennes, la logique de la concurrence a des conséquences qui se mesurent aujourd’hui au nombre d’incidents en constante augmentation et aux nombreux retards constatés par tous les usagers.
Les dysfonctionnements sur cette ligne Paris-Limoges, que j’utilisais au temps glorieux du « Capitole », sont symptomatiques de ce que l’on constate depuis la création de Réseau ferré de France (RFF) en 1997. La SNCF a tout misé sur le développement des TGV délaissant les villes moyennes ou petites qui sont devenues des déserts ferroviaires. Des dizaines de gares de départements ruraux comme la Creuse ou le Cantal, ont été peu à peu abandonnées. Les populations ont été enchaînées au « tout voiture », non par désir mais parce qu’elles ne pouvaient plus circuler hors ce moyen de transport.
La maintenance des réseaux a été négligée. Le matériel vétuste n’a pas été remplacé faute d’investissements nécessaires effectués en temps voulu. Les investissements dans ce domaine ont été sans cesse repoussés pour permettre à la SNCF et à RFF de demeurer compétitifs sur les marchés européen et mondial des transports. La pression sur les cheminots s’est traduite par cinq suicides depuis le début de l’année 2013.
Ce simple énoncé de faits constatés par tous les acteurs du secteur, montre que, dans ce domaine comme dans d’autres, les objectifs de la transition écologique ont été perdus de vue.
Le souvenir de l’ORTF
Mettre des moyens dans la maintenance ne suffira pas à régler le problème, qui est politique ; il se résume à cette question : ce gouvernement est-il décidé à engager une politique de mobilité adaptée à un nouvel aménagement du territoire qui conditionnera les investissements productifs du futur ? Malgré ses talents de communicant, Guillaume Pepy est dans la lignée des dirigeants des services publics d’aujourd’hui. Il prépare son entreprise à lutter contre les déficits plus qu’à protéger la sécurité des usagers et des cheminots.
Depuis la séparation du réseau en deux entités : l’exploitation des rails et celle des trains, un service public qui fonctionnait a été fragilisé. L’éclatement interne de la SNCF, lié à son organisation par branches et activités, avec des moyens humains et matériels dédiés, des rapports marchands entre les services, les filialisations, a cassé progressivement la culture cheminote et a démantelé l’entreprise nationale.
J’ai personnellement connu ce type de réforme appliquée à l’ORTF : sous prétexte de renforcer l’autonomie du service public, on avait installé la concurrence entre les chaînes et permis aux loups d’entrer dans la bergerie. Quelques années plus tard, la crise du service public de la radio télévision devenait structurelle et l’audiovisuel était soumis à la dictature de l’audimat.
L’optimisme béat du Président
C’est encore Ken Loach qui a tiré avant l’heure la morale de la catastrophe de Brétigny, avec son dernier film-document sur « l’esprit de 1945 » ; il y montre que les conquêtes du mouvement populaire sont pérennes si la population s’invite sur la scène politique.
Le drame de Brétigny nous oblige à repenser le service public et à réfléchir sur le sens d’une société où, sous prétexte de sérieux budgétaire, la seule politique consiste à bien organiser la gestion comptable d’un pays en fonction des seuls desiderata des « marchés ». Sinon, nous risquons de connaître d’autres Brétigny, non seulement dans les gares mais aussi dans les hôpitaux et dans les écoles.
L’optimisme béat du président de la République ce 14 juillet contrastait avec la tristesse des habitants de Brétigny et des usagers de la ligne C du RER. La méthode Coué ne fait pas une politique.
REPORTAGE - L'état des rails français fait polémique, plus d'un mois après le déraillement d'un train à Brétigny-sur-Orge (Essonne). Des voix s'élèvent en effet, affirmant que la catastrophe était prévisible.
Il y a un mois et demi, les Français étaient sous le choc après l'accident de Brétigny-sur-Orge, qui avait entraîné la mort de sept personnes. En cause : une pièce défectueuse sur la voie. Trois enquêtes sont depuis en cours, mais Réseau Ferré de France, qui gère les installations, écarte pour sa part l'idée d'un vieillissement du réseau.
Toutes les règles de précaution se sont petit à petit volatilisées
Patrick, ex-cheminot
Pourtant, à écouter les cheminots, cette catastrophe était à prévoir, et le vieillissement du réseau est bien une réalité. En effet, ceux qui travaillent sur le terrain prononcent tous cette phrase glaçante : "Ça fait très longtemps qu'on s'attendait à une catastrophe."
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Brétigny : un ingénieur retraité avait mis en garde la SNCF
A l'instar de Patrick, qui a travaillé 15 ans dans les brigades d'entretien du réseau. Hors micro, il raconte que "toutes les règles de précaution se sont petit à petit volatilisées. Il y a moins de monde pour inspecter les voies, fini les remplacements systématiques de pièces, on est tombés dans le rafistolage", témoigne-t-il.
Il y a des lignes où j'ai peur
Patrick
Patrick est aujourd'hui conducteur de train, et son constat est inquiétant : "Il y a des lignes où j'ai peur", dit-il. "Partout, il y a des joints, des éclisses cassées, des écrous qui manquent, la locomotive tremble tellement qu'il m'arrive de sauter de mon siège de conducteur." Pourtant, lorsqu'il rapporte ces problèmes auprès de ses supérieurs, il reçoit des consignes telles que : "N'en parlez pas, roulez moins vite, sinon ça va casser", relate-t-il.
Des risques pour les usagers au quotidien
Certains signaux sont inquiétants, et des lanceurs d'alerte mettent en garde depuis plusieurs années déjà. C'est le cas de Christian Brochet, âgé de 77 ans. C'est un ancien chef d'entreprise spécialisé dans la fabrication de pièces pour la SNCF. Tragique hasard, il habite à Brétigny-sur-Orge. Il y a un an et demi déjà, alors qu'il attendait le RER et scrutait la voie, beaucoup de choses lui frappaient au yeux.
C'était hallucinant, j'ai relevé 36 anomalies sur 180 mètres de voies
hristian Brochet
"C'était hallucinant, j'ai relevé 36 anomalies sur 180 mètres de voies", témoigne-t-il au micro de RTL. Inquiet, il avait alors rédigé trois courriers à la SNCF, qui lui avait répondu, rassurante : "Il n'y a aucun risque pour la sécurité". C'était 18 mois avant l'accident de Brétigny-sur-Orge...
A ce rythme-là, il faudra 28 ans pour moderniser un réseau à l'agonie
Eric Falampin, de FO Cheminot
Réseau ferré de France reconnaît tout de même que "pendant des années, on a tout misé sur le TGV". "Aujourd'hui, près de 5 milliards sont investis chaque année sur les lignes historiques. Mais vu l'état du réseau, c'est insuffisant", juge ainsi Eric Falampin, de FO Cheminot. Et d'ajouter : "Les fonds permettent de changer 1.000 kilomètres de voie par an. A ce rythme-là, il faut 28 ans pour moderniser un réseau à l'agonie."
Si la France veut se doter d'un réseau ferré convenable, il faut donc qu'elle se prépare à dépenser d'autres milliards, et surtout, il faut s'attendre à des heures de retards sur toutes ces lignes à rénover.
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Ce que je voulais écrire, c'est que le couple de serrage sur site peut être très largement au dessus de la limite élastique du boulon (en fonction de l'opérateur).
Ensuite le congé de raccordement de la tête constitue un point faible , et je peux t'assurer que si on serre un boulon jusqu'à la rupture, volontairement, la tête casse souvent (voire plus que le filetage) car le congé subi deux contraintes (allongement et torsion) concentrées sur une zone très réduite.
N'empêche que la rupture de Bretigny -celle que le rapport du BEA renvoie à l'expertise judiciaire pour ne mettre personne en cause- j'ai eu la même sur mon parcours il y a quelques années...Sur un groupe UIC 3 et heureusement à V=60km/h et en alignement.
Fissure en étoilure qui part du premier trou, sauf que dans mon cas elle était remontée jusqu'au champignon et donc on a vu la rupture de l'extérieur. Coup de chance ?
Arrêt des circulations, mise en place d'un coupon en remplacement, commande coeur en urgence...
L'origine du défaut était lié au remplacement précédent du coeur où on avait laissé les mauvaises éclisses de raccord d'usure : remplacement d'un coeur usé pas un coeur neuf, classique, rien de bien méchant à la base, ça "tapait" juste un peu au passage des trains, rien de bien grave en apparence. Mais cela avait engendré une fissuration accélérée (en quelques années) dans l'éclissage à cause des chocs dynamiques liés à l'espèce de marche d'escalier ainsi créée. C'est pour ça que quand j'ai vu Bretigny j'ai tout de suite compris. Je n'ai pas dormi la nuit suivante...
A l'époque je me disais déjà qu'on commençait à toucher le fond car les petits gars sur le terrain ne savaient plus faire une famille A... Ou personne ne leur avait expliqué. Ils avaient même perdu le marteau d'auscultation, seule méthode efficace pour la recherche de ce type de fissure sans démontage de l'éclissage...
Mais heureusement on avait encore un peu de monde sur le terrain, je savais que cela allait s'arranger, que des gens allaient s'apercevoir que cela ne pouvait pas durer...
J'étais trop optimiste...
Vouloir faire malgré tout quand on n'a plus les moyens, c'est le mal qui ronge l'équipement depuis 20 ans. Ce mal trouve son origine dans la fait que ce ne sont plus les techniciens qui décident du travail à faire mais les comptables, les juristes et les controleurs de Gestion à la recherche d'économie impossible. A force de presser l'orange, il n'y a plus de pulpe...
Quand un conducteur ou un controleur est absent, le train ne roule pas. A l'équipement, quand il manque un agent sur un chantier, on fait quand même, on va rogner sur quelque chose...Deux agents aussi... Où est la limite ?