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Ils se fermèrent à eux-mêmes la voie de la résipiscence"
Au printemps 1934, Charles de Gaulle faisait paraître « Vers l'armée de métier ». Il faudrait une sacrée dose de mauvaise foi pour me taxer de gaullisme. Toutefois, depuis les neuf ans que j'ai acheté les Mémoires de guerre chez un bouquiniste de Montélimar, le paragraphe qui suit, extrait de la page 21, me reste dans la tête, et me contraint à réfléchir :
Citation :
" ...
Cependant, les organismes officiels et leurs soutiens officieux, plutôt que de reconnaître d'évidentes nécessités et d'accepter le changement, quitte à en aménager la formule et les modalités, s'accrochèrent au système en vigueur. Malheureusement, ils le firent d'une manière si catégorique qu'ils se fermèrent à eux-mêmes la voie de la résipiscence. Pour combattre la conception de l'armée mécanique, ils s'appliquèrent à la défigurer. Pour contredire l'évolution technique, ils s'employèrent à la contester. Pour résister aux événements, ils affectèrent de les ignorer. Je vérifiai, à cette occasion, que la confrontation des idées, dès lors qu'elle met en cause les errements accoutumés et les hommes en place, revêt le tour intransigeant des querelles théologiques.
Le général Debeney, glorieux commandant d'armée de la grande guerre, qui, en 1927, en sa qualité de Chef d'état-major général, avait élaboré les lois d'organisation militaire, condamnait formellement le projet. Dans la Revue des Deux Mondes, il exposait avec autorité que tout conflit européen serait tranché, en définitive, sur notre frontière du nord-est que le problème consistait à tenir solidement celle-ci. Il ne voyait donc rien à changer aux lois, ni à la pratique,
... Le général Weygand ...
Le maréchal Pétain ... "
Soit le gratin du commandement militaire de l'époque.
Ecrivain exigeant avec lui-même, Charles de Gaulle avait le don de ramener sur le devant de la scène des mots rares, parfois désuets, tous parfaitement justes (à la «
chienlit » près... et le «
Volapück » non plus, n'était pas des plus heureux), et qui obligeaient le gros des français à ouvrir un dictionnaire pour déchiffrer chaque discours télévisé du général. Nous voici donc avec « résipiscence » dans la mâchoire. A nous de le digérer, car c'est justement un concept-clé pour notre action. O.W. Wilson lorsqu'il reprit en main la police de Chicago en 1960 fut bien contraint de ne sanctionner qu'une minorité de policiers, les irrécupérables, et amener à la compétence et à la résipiscence le plus grand nombre. Nous sommes devant la même contrainte stratégique.
Celui qui a le mieux compris cette contrainte, fut Gandhi. Et les résultats obtenus par ceux qui l'ont compris, j'ai nommé le pasteur Martin Luther King et l'avocat Nelson Mandela, sont parmi les résultats les plus remarquables du 20e siècle. Nous devons obtenir la prise de conscience de leurs erreurs et leur amendement, soit la résipiscence, du plus grand nombre, c'est indispensable pour isoler les brebis les plus galeuses. Tel doit être le guide de notre action au long des années qu'il y faudra.