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Auteur Sujet: Gènes sauteurs, parasites moléculaires endogènes...  (Lu 1962 fois)

JacquesL

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Gènes sauteurs, parasites moléculaires endogènes...
« le: 23 septembre 2008, 07:59:41 pm »
Les gènes « sauteurs »
Patrick Berche. Une histoire des microbes. John Libbey Eurotext.

Dans les années 50, on découvrit le phénomène de la lysogénie. Certains virus peuvent s'intégrer dans les chromosomes des bactéries et modifier leur patrimoine génétique. Ainsi, les bactéries sont capables d'acquérir des gènes nouveaux au cours de leur existence et donc des capacités nouvelles (comme la production de toxine) qui peuvent faciliter leur adaptation à l'environnement ou modifier leur pouvoir pathogène. C'était en apparence une exception à la vision d'un génome immuable alors largement acceptée. On pouvait dire que les bactéries étaient en quelque sorte « lamarckiennes »5, c'est-à-dire capables d'acquérir au cours de leur existence des gènes nouveaux qui leur permettent de mieux s'adapter à l'environnement. En fait, cette plasticité du génome allait s'avérer vraie pour l'ensemble du monde vivant, des plantes aux animaux, y compris l'homme. Cette grande percée conceptuelle vint des découvertes remarquables de Barbara McClintock (1902-1992). Entrée en 1942 au département de génétique de Cold Spring Harbor où elle travaillera toute sa vie en toute liberté, cette jeune généticienne américaine allait bouleverser les fondements de la génétique par la mise au jour des étonnantes propriétés de certains gènes du maïs. Travaillant sur cette espèce végétale, elle découvrit en 1944 deux nouveaux « gènes » aux propriétés insolites 6. En 1948, elle montra de façon très surprenante que ces gènes changeaient de position sur les chromosomes du maïs et semblait influencer l'activité des gènes situés à leur proximité. Ces « gènes sauteurs » furent les premiers éléments mobiles décrits. Ces observations lui firent développer une théorie révolutionnaire selon laquelle ces gènes mobiles (ou « éléments mobiles ») avaient pour fonction de moduler l'activité des autres gènes, en inhibant ou en stimulant leur activité 7. Cette théorie largement confirmée par la suite brisait le dogme de l'immuabilité d'un patrimoine génétique et proposait l'idée d'une plasticité des génomes. Elle présenta en 1951 sa découverte et ses hypothèses sur l'élément mobile Ac du maïs dans l'incompréhension et l'indifférence générale. Trente-deux ans plus tard en 1983, elle reçut le prix Nobel pour cette découverte.

Le caractère infectieux des éléments génétiques mobiles fut par la suite mis en évidence chez la mouche du vinaigre (Drosophila) par les travaux de Margaret G. Kidwell à partir de 1977. Il fut montré qu'existent dans les chromosomes de cette mouche plusieurs dizaines de copies d'un élément génétique mobile désigné P, « transposables » (on les appellera « transposons » ). On s'aperçut que le génome des souches de l'espèce Drosophila melanogaster isolées dans la nature avant les années 40 était dépourvu d'élément P. A partir des années 50, l'élément P apparut chez des individus de cette espèce jusque-là indemne. L'apparition de ces éléments mobiles entraînait dans certaines conditions des anomalies génétiques 8. Ces éléments provenaient en fait d'une autre espèce de mouche d'origine américaine, Drosophila willistoni. Les deux espèces avaient divergé il y a 60 millions d'années. Drosophila melanogaster est d'abord apparue en Afrique de l'Ouest et s'est dispersée à travers le monde en suivant les migrations humaines, devenant une espèce cosmopolite, alors que Drosophila willistoni a vécu de façon casanière en Amérique latine. Cette dernière espèce porte à l'état naturel l'élément P. Les deux espèces se sont côtoyées à partir du XIX` siècle lorsque l'espèce cosmopolite fut importée par les échanges maritimes et s'implanta en Amérique. Le passage de l'élément P chez les mouches cosmopolites a pu se faire par l'intermédiaire d'un virus ou d'un petit acarien piqueur, puis la dissémination dans l'espèce se serait faite par croisement des mouches « saines » et des mouches « P ». La diffusion de l'élément P chez ces mouches s'apparente bien à un phénomène de nature infectieuse.

Par la suite, on aperçut que des éléments génétiques mobiles existaient chez pratiquement tous les êtres vivants, des bactéries aux mammifères, y compris l'homme. Il existe en fait deux types d'éléments génétiques mobiles. Les « transposons » sont constitués d'un seul gène codant une enzyme, la « transposase » qui permet leur mobilité dans le génome. Les « rétrotransposons » de structure plus complexe codent des transcriptases-réverses proches de celles des rétrovirus, mais sont dépourvus des gènes codant les protéines d'enveloppe des rétrovirus qui leur per-mettraient de se propager à d'autres cellules. Ces rétrotransposons peuvent transposer sur les chromosomes des cellules qui les hébergent mais sont incapables de se propager à d'autres cellules, à la différence des rétrovirus 9. Ce sont de véritables « parasites moléculaires » anciens et ubiquistes. Tous ces éléments mobiles sont transmis à la descendance et représentent près de 10 à 50 % du génome des bactéries et des cellules eucaryotes 10 (champignons, protozoaires, plantes, animaux...). Ces rétrotransposons endogènes pourraient parfois produire des pseudo-particules virales et constituer des précurseurs potentiels des rétrovirus infectieux.

Le rôle des éléments génétiques mobiles présents dans le génome des êtres vivants est inconnu, mais il pourrait être important, comme l'a suggéré Barbara McClintock, pour la plasticité du génome au cours de l'évolution ou pour de grands processus vitaux comme le vieillissement. Comme cela a été montré pour l'élément P, les éléments mobiles pourraient jouer un rôle important chez l'homme dans la genèse de certaines maladies considérées comme « idiopathiques », c'est-à-dire de cause inconnue. Ainsi, on a décrit des pathologies génétiques liées à des insertions de rétrotransposons ou de transposons dans certains gènes11. Ces maladies génétiques pourraient donc remonter à un événement fondateur, l'insertion d'un élément génétique mobile dans ou en amont d'un gène important, empêchant ainsi son fonctionnement, expliquant la transmission à la descendance.

L'existence de ces parasites endogènes illustre bien la complexité des mécanismes physiopathologiques qui pourraient être à l'origine de maladies « idiopathiques » et impose une réflexion sur la notion même d'agent infectieux. N'y a-t-il pas des maladies qui seraient le résultat de l'acquisition de gènes étrangers exprimés chez certains patients ou entraînant des dysfonctionnements graves par leur localisation chromosomique ? En cherchant à définir un agent pathogène, on est arrivé avec les éléments mobiles à la frontière entre les maladies génétiques et les maladies infectieuses. Cette frontière floue existe aussi avec les formes héréditaires des encéphalopathies spongiformes à prions. Le champ de la recherche sur les maladies infectieuses reste largement ouvert. L'avenir continuera de nous surprendre.




5. Jean-Baptiste Lamarck (1744-1829) pensait que « la fonction crée l'organe »,.

6. Barbara McClintock appela ces gènes « Dissociator » (Ds) et « Activator . (Ac). La présence du gène Ds semblait avoir des effets sur des gènes de son voisinage, seulement observés en présence du gène Ac.

7. Ces éléments mobiles n'étaient pas des gènes à proprement parlé codant des protéines mais des éléments de contrôle (controlling elements). Selon Barbara McClintock, ceci pouvait expliquer pourquoi les tissus des organismes complexes (cerveau, foie, peau...) expriment à partir. d'un même patrimoine génétique des niveaux très différents de plusieurs protéines selon leur environnement cellulaire.

8. On appelait cela la  « dysgénésie des hybrides », qui présentaient un fort taux de mutations, des cassures chromosomiques et une stérilité par atrophie des gonades.

9. Les rétrovirus comme le virus du sida (HIV) possèdent un petit génome de 8 700 nucléotides environ, codant une transcriptase reverse (Le gène pol), une protéine de capside (le gène gag), une protéine d'enveloppe (le gène env), et des protéines régulatrices. Les rétrotransposons des formes réduites ou précurseurs de rétrovirus codent une transcriptase reverse qui copie l'ARN en ADN capable de s'intégrer au génome.

10. Chez la mouche du vinaigre, ces éléments représentent 10-15 % du génome correspondant à 3000 et 5000 éléments mobiles et chez les mammifères environ 10 % du génome et jusqu'à 35 % chez l'homme (comme chez la souris) avec près de 10 000 à 300 000 copies de certains éléments. On connaît 30-50 familles d'éléments transposables répartis de façon apparemment aléatoire le long des chromosomes des êtres vivants. Par exemple, on dénombre dans le génome humain près de 5 000 copies d'un transposon appelé mariner et plusieurs milliers de rétrotransposons « endogènes » appelés HERV (Human Endogeneous Retrovirus), correspondant à 0,5-1 % du génome chez l'homme.

11. Des insertions de rétrotransposons ont été rapportées dans certains gènes, comme celui du facteur VIII, dans certaines hémophilies, dans le gène de la dystrophine (myopathie de Duchenne), le gène de l'anti-oncogène APC (cancer du côlon), le gène de l'oncogène myc (cancer du sein), le gène de la fukutine (Fukuyama-type congenital dystrophy). Les rétrotransposons ont aussi été impliqués dans l'activation d'oncogènes en s'insérant dans des séquences adjacentes à ces gènes. Enfin, deux maladies humaines rares, la maladie de Charcot-Marie-Tooth de type LA et une neuropathie héréditaire, pourraient être liées à un transposon-mariner à l'origine de recombinaisons aberrantes du chromosome 17.


Figure 3. Structure schématique des transposons et rétrotransposons.
Le transposon porte un seul gène codant pour une transposase encachée par des séquences inversées (inverted repeats terminal [IRTI] ; les rétrotransposons (avec ou sans Long Terminal Repeats [ LTR ] qui permettent l'intégration du transposon dans les génomes) portent plusieurs gènes codant pour une intégrase (IN), une nucléase (NU), une transcriptase reverse (RT) et une protéine GAG ; les rétrovirus ont une structure similaire avec en plus un gène codant pour une protéine d'enveloppe (env).

Fin de citation.

J'ai numérisé ces quatre pages finales, en raison de l'ignorance crasse du grand public, et tout particulièrement des délirants du créationnisme, sur les ressources biologiques accumulées au cours de plus de quatre milliards d'années d'essais et d'erreurs, et sur la complexité de la génétique. Puissent ces quelques pages aider à un peu de modestie et de curiosité.
« Modifié: 23 septembre 2008, 08:29:29 pm par Jacques »

JacquesL

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Le mycobacterium leprae, ou bacille de Hansen,
« Réponse #1 le: 25 septembre 2008, 01:55:03 am »
Le mycobacterium leprae, ou bacille de Hansen, est une bactérie non cultivable, à métabolisme fort lent. Les données de séquençage de son génôme portent témoignage de son origine récente, et d'une longue phase de parasitisme sur l'espèce humaine. En effet, on a trouvé de nombreux pseudo-gènes, c'est à dire de gènes incomplets devenus inutiles, du fait du parasitisme étroit sur l'homme.

La préparation des souches atténuées pour vaccin, découverte empiriquement par Pasteur, Roux et Chamberland, a été reconnue récemment être une manipulation génétique indirecte. La souche virulente, soit par longue exposition à l'oxygène de l'air, ou au bichromate de potassum, soit par séjour à une température limite (élevée, mais pas trop pour ne pas déclencher la sporulation), soit par passage sur une espèce éloignée de l'espèce habituellement parasitée, modifie l'expression de ses gènes, jusqu'à devenir avirulente pour son espèce favorite. Elle peut alors être utilisée en vaccin : elle stimule les défenses immunitaire de l'hôte, sans réussir à l'envahir et le rendre vraiment malade.

Ces modifications de l'expression des gènes sont à la base de l'adaptation des plantes à des conditions climatiques qu'elles n'ont pas choisies et qu'elles ne peuvent fuir. Leur génôme est du reste largement plus long que celui des animaux, et a fortiori des bactéries.

JacquesL

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Plasticité du génôme.
« Réponse #2 le: 25 septembre 2008, 11:41:52 pm »
Plasticité du génôme.

http://fr.youtube.com/watch?v=TUxLR9hdorI
Combien de preuves d'attaques de rétrovirus, dites ERV (Endogenous Retrovirus) exactement au même endroit, dans le rénôme du chimpazé et dans le nôtre ?
Il en résulte une probabilité de 1 sur 3 millions, à la puissance (nombre de coïcidences) que cette coïncidence arrive par hasard, et non par héritage.

Combien d'ERV communes ? 16 pour la seule classe K.
Environ 98 000 en tout, et la plupart sont partagés avec tous les singes de l'ancien Monde.



L'exceptionnelle et inquiétante uniformité génétique des guépards s'explique par une population réduite à sept individus fertiles en tout, il y a dix mille ans. Ce qui pose problème au dogme de l'Arche de Noé : seulement deux individus par espèce voici 4 mille ans, et pourtant toute la variabilité actuellement présente sur toutes les espèces - sauf les guépards. Génétiquement absurde.
http://fr.youtube.com/watch?v=rIlWKp44T50&NR=1


Pourquoi nous ne produisons pas de vitamine C, contrairement à la souris ? Le gène de sa synthèse existe à l'état vestigiel, mais n'est plus fonctionnel : il a trop muté. Cette séquence de 152 nucléotides n'est plus qu'un pseudogène.
http://fr.youtube.com/watch?v=SA_UFImmulY


Résumé :
http://fr.youtube.com/watch?v=-CvX_mD5weM


Atavismes : jamais entre mammifères et oiseaux.
http://fr.youtube.com/watch?v=K11knFKqW4s

Etc...

--
La science se distingue de tous les autres modes de transmission des connaissances, par une "croyance" de base : nous croyons que les experts sont faillibles, que les connaissances transmises peuvent contenir toutes sortes de fables et d’erreurs, et qu’il faut prendre la peine de vérifier, par des expériences. Platicité du génôme.

http://fr.youtube.com/watch?v=TUxLR9hdorI
Combien de preuves d'attaques de rétrovirus, dites ERV (Endogenous Retrovirus) exactement au même endroit, dans le rénôme du chimpazé et dans le nôtre ?
Il en résulte une probabilité de 1 sur 3 millions, à la puissance (nombre de coïcidences) que cette coïncidence arrive par hasard, et non par héritage.

Combien d'ERV communes ? 16 pour la seule classe K.
Environ 98 000 en tout, et la plupart sont partagés avec tous les singes de l'ancien Monde.



L'exceptionnelle et inquiétante uniformité génétique des guépards s'explique par une population réduite à sept individus fertiles en tout, il y a dix mille ans. Ce qui pose problème au dogme de l'Arche de Noé : seulement deux individus par espèce voici 4 mille ans, et pourtant toute la variabilité actuellement présente sur toutes les espèces - sauf les guépards. Génétiquement absurde.
http://fr.youtube.com/watch?v=rIlWKp44T50&NR=1


Pourquoi nous ne produisons pas de vitamine C, contrairement à la souris ? Le gène de sa synthèse existe à l'état vestigiel, mais n'est plus fonctionnel : il a trop muté. Cette séquence de 152 nucléotides n'est plus qu'un pseudogène.
http://fr.youtube.com/watch?v=SA_UFImmulY


Résumé :
http://fr.youtube.com/watch?v=-CvX_mD5weM


Atavismes : jamais entre mammifères et oiseaux.
http://fr.youtube.com/watch?v=K11knFKqW4s

Etc...

--
La science se distingue de tous les autres modes de transmission des connaissances, par une "croyance" de base : nous croyons que les experts sont faillibles, que les connaissances transmises peuvent contenir toutes sortes de fables et d’erreurs, et qu’il faut prendre la peine de vérifier, par des expériences.