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Auteur Sujet: Les créationnistes voudraient bien brûler "Le hasard et la nécessité"  (Lu 5456 fois)

JacquesL

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J. Monod, Le hasard et la nécessité: Essai sur la philosophie naturelle de la biologie moderne, Seuil, 1970 (ISBN 2020028123)

Il est comme cela des boussoles qui indiquent le Sud. Si elles sont régulières dans cette erreur, alors elles peuvent devenir des instruments utiles. Il suffit de lire leur indication à l'envers.

Parmi ces boussoles qui indiquent le Sud, j'avais remarqué la haine totale et les flots d'insultes que les créationnistes et les animistes de diverses obédiences vouent au livre historique de Jacques Monod : "Le hasard et la nécessité".
Je l'ai donc enfin emprunté et lu, longtemps après tout le monde.
On prétend que le livre est réductionniste. C'est faux. Monod démontre au contraire que le réductionnisme est condamné à échouer. En fait ce mot est employé à contre-sens par les détracteurs, qui espèrent que les lecteurs se contenteront de faire semblant de comprendre.
On prétend que le livre est extrémiste (car il est athée). Ça, c'est presque vrai, en ce sens précis, que Jacques Monod est allé au bout de ses idées, au lieu de s'arrêter effrayé à sa première boutade. Je n'ai appris à être "extrémiste" en ce sens là que très tard, dans les années 1974-1976, et uniquement parce qu'un homme a su nous encourager à aller jusqu'au  bout de chacune de nos idées, de nos amorces de trouvailles jusqu'à en faire de vraies trouvailles accomplies.
On prétend aussi que le livre est mal écrit, car il critique les mythes de Pierre Theillard de Chardin, et que par concession diplomatique aux mythologies du lecteur moyen, il accole plusieurs fois l'épithète "heureux" au substantif "hasard".

Balivernes. Ce livre est TRES bien écrit, très approfondi et prudent. Et la mauvaise foi est systématique chez ses détracteurs fanatiques. Non seulement Theillard et toutes les religions en prennent pour leur grade, mais Marx, Engels et les marxistes aussi. Eux aussi sont des animistes... "Plus encore que les autres animismes, le matérialisme historique repose sur une confusion totale des catégories de valeur et de connaissance."

Ma note de lecture ne sera jamais aussi détaillée que celle que vous pouvez télécharger sur le site du CNAM à www.cnam.fr/lipsor/dso/articles/fiche/monod.rtf, que je vous invite donc à lire.

Un extrait concerne les fonctions du système nerveux, à http://gfev.univ-tln.fr/H21/Le_hasard_et_la_n%E9cessit%E9.html

Autres résumés, plus ou moins lapidaires :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Hasard_et_la_N%C3%A9cessit%C3%A9
http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Monod_(biologiste)
Citer
Anecdote

    * Le livre Le Hasard et la nécessité est paru en 1970, année de l’annonce par Howard Temin de la réalité de la transcriptase inverse dans certains virus. Monod écrit le passage suivant : « Il n’est ni observé, ni d’ailleurs concevable, que l’information soit jamais transférée dans le sens inverse (c’est-à-dire de l’ARN vers l’ADN). C’est l’un des principes fondamentaux de la biologie moléculaire. ». Idée largement battue en brêche depuis.


http://www.culturesfrance.com/adpf-publi/folio/lirelascience/05.html
Citer
Malgré un affaiblissement de l’idée de progrès fondée sur la science, en France la faveur dont jouissent les scientifiques et les centres de recherche ne s’amenuise pas. Le prestige des chercheurs de l’Institut Pasteur n’est peut-être pas étranger à l’impact des livres d’André Lwoff, de François Jacob et surtout de Jacques Monod. Paru à l’automne 1970, Le Hasard et la Nécessité est un succès de librairie. L’ouvrage, qui s’annonce comme le retour d’une philosophie naturelle, déclenche un débat très vif dans le milieu intellectuel. Michel Foucault en fait la recension dans Le Monde des 15-16 novembre 1970. Il insiste sur l’aspect blessant et inquiétant pour la pensée du savoir scientifique. Michel Serres estime qu’à ignorer les nouveaux outils apportés par la cybernétique et la théorie de l’information, on se condamne à des combats d’arrière-garde. À l’inverse, Louis Althusser critique la «philosophie spontanée des savants». Il dénonce «une tendance idéaliste irradiant à partir des prises de position idéologiques». L’historien des sciences François Russo discerne chez Monod un certain «jansénisme» qui n’a rien à voir avec la science. Madeleine Barthélemy-Madaule, elle, conteste la généralisation de la biologie moléculaire à tout l’univers: «Dans ce livre provocant tout est question de frontière dès l’annonce des épigraphes, et, plus tard, dans les incursions en terrain philosophique et moral.»

Le lecteur est pourtant, dès la préface, dûment averti par Monod: «Il reste à éviter bien entendu toute confusion entre les idées suggérées par la science et la science elle-même; mais aussi faut-il sans hésiter pousser à leur limite les conclusions que la science autorise afin d’en révéler la pleine signification. [...] Encore une fois cet essai ne prétend nullement exposer la biologie entière mais tente franchement d’extraire la quintessence de la théorie moléculaire du code. Je suis responsable bien entendu des généralisations idéologiques que j’ai cru pouvoir en déduire [... ainsi que] des développements d’ordre éthique sinon politique.»
On a vu plus haut pourquoi Louis Althusser ne pouvait que trouver hérétique un tel livre.
L'accusation par Madeleine Barthélemy-Madaule est de pure affabulation, est une falsification du contenu réel écrit par Monod. Oui, mais les besoins en autothéories...

Ecrit voici près de quarante ans, le livre a donc pris une ride, en ce sens qu'une transcriptase inverse a été décrite. Une seule ride... Il demeure une excellente introduction à la biologie moléculaire pour l'honnête homme du 21ème siècle.

La conclusion par Monod que rien ne peut nous dispenser de créer et raffiner au jour le jour notre éthique et nos valeurs, a choqué tous les croyants en divers animismes. Nous l'avions redécouverte de même.

Trois outils et concepts à signaler pour cela : autothéorie, réflexivité, accès à la résipiscence.
Le concept d'autothéorie nous a été transmis par notre prof de psychosociale et de clinique Henri Jidouard. Il semble bien qu'il en soit le créateur, il l'utilisait mais ne le définissait pas. Illustration : "Des besoins en autothéorie, à leur dépassement dialectique : des méthodes ?" http://deonto-famille.info/index.php?topic=22.0

L'outil d'analyse en réflexivité est exposé brièvement à http://jacques.lavau.deonto-ethique.eu/Reflexivite.html.

Résipiscence : ce mot rare nous a été envoyé à la figure par Mongénéral, dans ses Mémoires de guerre. Si rare soit le mot, le concept est central pour la santé mentale et pour la discipline scientifique. Il n'est pas indépendant, mais lié aux deux autres cités : la réflexivité et le besoin en autothéories.

http://deonto-famille.info/index.php?topic=53.0 :   "Le non-accès à la résipiscence, une question centrale."

« Modifié: 20 mai 2011, 04:49:31 pm par Jacques »

JacquesL

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Re : Les créationnistes voudraient bien brûler "Le hasard et la nécessité"
« Réponse #1 le: 25 décembre 2007, 01:09:13 am »
http://www.cnam.fr/lipsor/dso/articles/fiche/monod.rtf

La note de lecture du CNAM sur Le hasard et la nécessité, de Jacques Monod :

L'AUTEUR ET SON ESSAI

Jacques Monod (1910-1976) est un des pères fondateurs de la biologie moderne moléculaire et génétique. Chercheur français, il reçut le Prix Nobel de médecine en 1965. Son ouvrage, Le hasard et la nécessité (1970) est le fruit d’une réflexion philosophique et épistémologique par laquelle il fait une synthèse de sa vie de chercheur et de ses actions, donne un sens à la science biologique moderne, comme le Sisyphe de Camus enseigne la fidélité supérieure et lutte vers les sommets avec son rocher pour n’avoir de cesse d’être heureux. Cet essai est fondé sur une série de conférences (les “ Robbins Lectures ”) données en février 1969 au collège Pomona, en Californie, et d’un cours au Collège de France pendant l’année scolaire 1969-1970. Nœud d’un chassé-croisé entre sciences biologiques, en particulier moléculaires et génétiques, sciences physiques et chimiques, et sciences naturelles, il s’inspire explicitement autant de Darwin que de Démocrite, pour remettre en cause le matérialisme dialectique, introduire la notion de “ nécessité ” évolutionniste au niveau macro-moléculaire tout en maintenant la constatation du “ hasard ”  au niveau micro-moléculaire. Il souhaite en conclusion l’avènement d’un monde moderne où la recherche de la connaissance sera la valeur commune fondamentale, permettant l’harmonie entre nos croyances encore trop inspirées d’animisme, et nos usages et connaissances induits des progrès de la science et de la technologie.

LES QUESTIONS POSÉES

Dans cet ouvrage, comme tout au long de ses recherches en biologie moléculaire et génétique, J. Monod s'interroge sur le rôle particulier des protéines au niveau microscopique -et de l’ADN en particulier- comme agents moléculaires de la téléonomie structurale et fonctionnelle. Il cherche finalement à inclure l’espèce humaine dans son analyse de l’évolution des espèces vivantes, alors qu’elle n’apparaissait pas encore dans les théories de Ch. Darwin s’inspirant pourtant déjà des facteurs héréditaires, et réfléchit sur l’influence réciproque des facteurs du hasard et de la nécessité aux niveaux microscopique et macroscopique des êtres vivants.
Son ouvrage se veut plus philosophique que scientifique, en cela qu’il cherche à bien différencier entre les idées suggérées par la science (et les conclusions qu’il tirera lui-même de son importante expérience et connaissance de chercheur en biologie et médecine), et la science elle-même.

LES POSTULATS

Darwin transposait au 19è siècle, la notion d’hérédité aux sciences naturelles, et partait ainsi du principe que cela est possible a priori. Un autre postulat était la contraignante domination des mécanismes héréditaires dans les phénomènes d'évolution des espèces. J. Monod rappelle ainsi tout d’abord que la Nature est objective et non projective, postulat pur et à jamais indémontrable, car il est évidemment impossible d’imaginer une expérience qui pourrait prouver la non-existence d’un projet, d’un but poursuivi où que ce soit dans la nature.
J. Monod apporte à cette vision les derniers apports de la “ biologie moléculaire du code génétique ” qu’il qualifie de théorie physique de l’hérédité, élargit ainsi les postulats de départ, et introduit les propriétés “ cognitives ” tant au niveau cellulaire comme la manifestation indirecte des facultés discriminatives de quelques protéines et surtout de l’ADN, qu’au niveau de l’individu dans sa capacité “ limitée ” par les lois de la chimie entre autres, à s’adapter à son environnement. Il postule de plus le double paradoxe d’un facteur de hasard et d’un facteur de nécessité, expliquant l’évolution des êtres dans l’univers, et de l’Homme en particulier, l’objectivité nous obligeant à reconnaître aussi le caractère téléonomique des êtres vivants.

LES HYPOTHÈSES

Les hypothèses à l'origine des réflexions de J. Monod se transforment ici en postulats ou propositions que l'auteur cherche à appuyer tout au long de son ouvrage.

LES RÉPONSES

Les dernières avancées de la génétique et de la biologie moléculaire amène J. Monod à réintroduire le facteur téléologique, contrairement à Ch. Darwin, pour qui l’évolution n’a pas de but et telle espèce aujourd’hui adaptée à son environnement, peut demain périr avec une transformation de celui-ci si une mutation préalable ne l’a pas dotée de qualités assurant sa survie dans le nouveau contexte. Il n’y a donc chez Darwin ni adaptation ni hérédité des caractères acquis, contrairement à ce que démontre J. Monod en s’inspirant d’une citation de Démocrite (père de l’épistémologie) dès le début de son ouvrage : “ Tout ce qui existe dans l’univers est le fruit du hasard et de la nécessité ”.

Il est indispensable de reconnaître les trois propriétés caractéristiques des êtres vivants, qui se distinguent ainsi de tous les systèmes présents dans l’univers : l’ invariance reproductive ou génétique s’exprime et se révèle à travers la morphogenèse autonome, de la structure moléculaire et cellulaire, qui constitue l’appareil  téléonomique. Selon Ch. Darwin, l’invariance précède nécessairement la téléonomie, en cela qu’elle transfert cette propriété d’invariance capable de “ conserver le hasard ” et d’en soumettre les effets au jeu de la sélection naturelle. D’après J. Monod, cette approche ne pouvait, en son temps, prendre en compte les mécanismes chimiques de l’invariance reproductive, ni la nature des perturbations que souffrent ces mécanismes, et reste trop empreinte de déterminisme. Sa thèse est qu’elle ne contient pas une classe d’objet ou de phénomènes, mais constitue un événement particulier, compatible mais non déductible des principes d’invariance et de téléonomie. Donc essentiellement imprévisible, ayant le droit d’exister, mais non pas le devoir.

Le message ainsi porté par une séquence de radicaux dans une fibre polypeptidique, qui semble écrit au hasard, est pour autant chargé d’un sens téléonomique de la structure globulaire, traduction à trois dimensions de la séquence linéaire. Dans l’ontogenèse d’une protéine fonctionnelle, le hasard ainsi capté, conservé, reproduit par la machinerie de l’invariance et ainsi converti en ordre, règle, donc nécessité. Ainsi, si chimiquement, les constituants sont les mêmes, c’est l’ADN qui assure l’invariance de l’espèce face à la prodigieuse diversité morphologique et physiologique qui pourrait découler de la combinaison de ces constituants primaires. La définition du gène comme porteur invariant des traits héréditaires, au travers des mécanismes de réplication et de traduction, complète et éclaire ainsi d’un jour nouveau la théorie de l’évolution sélective. C’est l’appareil téléonomique, tel qu’il fonctionne lorsque s’exprime pour la première fois une mutation qui définit les conditions initiales essentielles de l’admission, temporaire ou définitive, ou du rejet de la tentative née du hasard. C’est de ce fait que l’évolution elle-même paraît accomplir un “ projet ”.

Chez l’Homme, plus encore que chez tout autre animal, c’est le langage et le comportement individuel autant que collectif, donc également culturel, qui oriente la pression de sélection (au sens darwinien) et donc l’évolution du génome humain. D’où l’importance selon l’auteur de reconnaître la connaissance, ou plutôt l’éthique de la connaissance, comme projet fondamental commun de l’espèce humaine, pour harmoniser les peurs de nos sociétés modernes victimes selon lui du paradoxe entre les croyances philosophiques et religieuses encore trop empreintes d’animisme, et la vie actuelle des Hommes basée sur la connaissance et les usages issus de la science et de la technologie basée sur le principe d’objectivité.

LE RÉSUMÉ

Introduction et principes fondamentaux de la thèse

La biologie occupe, selon l’auteur, une place centrale puisqu’elle est, de toutes les disciplines celle qui tente d’aller le plus directement au cœur des problèmes pour tenter d’élucider quelque part, la relation de l’homme à l’univers. Elle a contribué à la formation de la pensée moderne depuis la révolution amenée par la théorie de l’Evolution de Ch. Darwin, à ceci près que, quoique dominant la biologie entière de par sa validité phénoménologique, elle restait suspendue tant que n’était pas élaborée une théorie “ physique ” de l’hérédité qui découle enfin des toutes dernières avancées en matière de “ biologie moléculaire du code génétique ”. La théorie moléculaire du code constitue selon l’auteur, une théorie générale des systèmes vivants comme base universelle de comportements au niveau microscopique, mais qui n’a pas pour vocation de prédire et résoudre toute la biosphère. Elle explique la structure chimique du matériel héréditaire et de l’information qu’il porte, et les mécanismes moléculaires d’expression, morphogénétique et physiologique, de cette information, mais ne théorise en rien directement les structures et fonctions complexes des organismes vivants.

J. Monod rappelle le postulat selon lequel, la Nature est objective et non projective, et démontre que les facteurs de régularité et de répétition qui qualifie d’ordinaire le caractère de projectivité, et donc les objets “ artificiels ”, s’appliquent aussi tout à fait paradoxalement à l’échelle microscopique (des dimensions qu’on exprimerait normalement en Angström = 10-8 cm), au sein des organismes vivants, donc “ naturels ”. Pour autant donc, les géométries et actions simples et répétitives des protéines, ne témoigneraient évidemment pas d’une intention consciente et rationnelle, mais des lois de la chimie. Il est par contre indispensable de reconnaître les trois propriétés caractéristiques des êtres vivants, qui se distinguent ainsi de tous les systèmes présents dans l’univers : l’ invariance reproductive ou génétique (pouvoir de reproduire et transmettre d’une génération à une autre l’information correspondant à leur propre structure de haut degré d’ordre) s’exprime et se révèle à travers la morphogenèse autonome, de la structure moléculaire et cellulaire, qui constitue l’appareil  téléonomique (ou le projet téléonomique qui consiste dans la transmission, d’une génération à l’autre, d’une certaine quantité d’information, du contenu d’invariance caractéristique de l’espèce).

Des deux classes de macromolécules biologiques essentielles, celle des protéines est responsable de presque toutes les structures et performances téléonomiques, tandis que l’invariance génétique est attachée exclusivement à l’autre classe, celle des acides nucléiques. Le deuxième principe de la thermodynamique impose que tout système macroscopique ne puisse évoluer que dans le sens de la dégradation de l’ordre qui le caractérise (caractérisé par l’augmentation de l’entropie = le désordre du système dans son ensemble). Dans la formation d’un réseau cristallin, l’accroissement local d’ordre du système, est compensé par un transfert d’énergie thermique de la phase cristalline à la solution saturée qui l’accueille dans le respect du 2ème principe énoncé, autant la reproduction invariante des cellules (et/ou des organismes vivants jusqu’à une certaine échelle) respecte autant qu’elle utilise à dessein ce 2ème principe, grâce à la perfection de l’appareil téléonomique qui effectue un échange d’énergie thermique (tout en étant avare de calories) et d’information, pour mieux conserver et reproduire la norme structurale.

Selon Ch. Darwin, l’invariance précède nécessairement la téléonomie, en cela qu’elle transfert cette propriété d’invariance capable de “ conserver le hasard ” et d’en soumettre les effets au jeu de la sélection naturelle. D’après J. Monod, cette approche ne pouvait, en son temps, prendre en compte les mécanismes chimiques de l’invariance reproductive, ni la nature des perturbations que souffrent ces mécanismes.

L’auteur se penche sur l’approche vitaliste de Bergson, Driesch (biologiste et philosophe), ou Elsässer et Polanyi (physiciens) qui défendent l’idée d’une évolution se projetant dans l’élan vital lui-même n’ayant ni cause finale ni cause efficiente. Il met alors en avant que l’invariance et la téléonomie, cristallisée dans le processus magnifique de l’embryogenèse, ne peuvent être expliquées à l’aide des forces physiques et des interactions chimiques révélées par les systèmes non vivants. J. Monod critique aussi les projections animistes, qui recherchent selon lui l’ancienne alliance avec la nature, pour atteindre son apogée avec les récents développements jugés par l’auteur plus poétiques que scientifiques d’un Teilhard de Chardin, du positivisme d’un Spencer, ou du matérialisme dialectique de Marx et Engels, structurant une théorie universelle selon laquelle l’évolution de la biosphère jusqu’à l’homme serait dans la continuité sans rupture de l’évolution cosmique elle-même, ce qui revient en fait à abandonner le postulat d’objectivité. Le matérialisme dialectique amènerait même à nier finalement le 2ème principe de la thermodynamique autant que l’évolution sélective de Darwin. Toutes ces approches, plus spécialement en ce qui concerne la biologie, font d’un principe téléonomique initial le moteur de l’évolution, soit de la biosphère seule, soit de tout l’univers, ce que conteste l’auteur, en ce que la théorie ne peut que déterminer la probabilité d’existence de la biosphère. Sa thèse est qu’elle ne contient pas une classe d’objet ou de phénomènes, mais constitue un événement particulier, compatible mais non déductible des principes d’invariance et de téléonomie. Donc essentiellement imprévisible, ayant le droit d’exister, mais non pas le devoir.

Les démons de Maxwell

Les protéines (en particulier les enzymes) doivent être considérées comme les agents moléculaires essentiels des performances téléonomiques des êtres vivants, en ce qu’elles sont le vecteur métabolique principal des cellules. L’organisme se construit lui-même, et la cohérence fonctionnelle d’une machine chimique aussi complexe exige l’intervention d’un système cybernétique contrôlant et gouvernant les processus chimiques en de nombreux points. La performance téléonomique d’un être vivant s’analyse en termes d’interactions stéréospécifiques de très nombreuses protéines (en particulier de l’extraordinaire électivité d’action des enzymes). Certaines structures de l’ADN jouent un rôle qu’il faut considérer comme téléonomique, et certains ARN constituent des pièces essentielles de la machinerie qui traduit le code génétique, mais des protéines spécifiques sont également impliquées dans ces mécanismes qui mettent en jeu des interactions entre protéines et acides nucléiques. Si on ajoute que les complexes formés entre enzyme et substrat sont de nature non-covalente, ces complexes sont nécessairement stéréospécifiques.

Le rôle d’un catalyseur comme les enzymes, étant de stabiliser l’état activé et transitoire d’une réaction chimique (voir figure), cette stabilité est adaptée à la fonction remplie, certains complexes enzyme-substrat étant aisément dissociables, quand d’autres acquièrent une stabilité du même ordre que celle d’une association covalente. On voit là, au niveau le plus élémentaire, comment l’information structurale peut être créée et distribuée chez les être vivants. Toute l’activité de synthèse des cellules, si complexe soit-elle, est, en dernière analyse, interprétable en termes similaires. Cette monotonie de composition prouve bien que la formidable diversité des structures macroscopiques des êtres repose sur une remarquable unité de composition et de structure microscopique.
Ces phénomènes imposent l’hypothèse d’une fonction “ cognitive ”, ce que Maxwell attribuait à son démon microscopique. Ce démon aurait eu le pouvoir de violer le second principe de la thermodynamique en manœuvrant sans consommation d’énergie, une trappe idéale lui permettant d’interdire ou de favoriser le passage de certaines molécules rapides (de haute énergie) ou lentes (de basse énergie) entre deux enceintes remplies d’un gaz quelconque, si l’on n’avait pas établi que l’exercice de ces fonctions cognitives supposait une interaction par elle-même consommatrice d’énergie et compensant la diminution d’entropie du système.

Cybernétique microscopique – Ontogenèse moléculaire

Les principaux modes régulatoires des enzymes sont les suivant : inhibition rétroactive, activation rétroactive, activation en parallèle, activation par un précurseur. De plus, de même qu’un relais électronique peut être asservi simultanément à plusieurs potentiels électriques, de même un enzyme allostérique l’est, en général, à plusieurs potentiels chimiques. Cependant, les interactions coopératives ou antagonistes des ligands, sont indirectes. Cette propriété fondamentale nous permet de comprendre l’origine et le développement des systèmes cybernétiques chez les êtres vivants. Entre le substrat d’un enzyme allostérique, et les ligands qui activent ou inhibent son activité, il n’existe aucune relation chimiquement nécessaire de structure ou de réactivité (principe essentiel de “ gratuité ” chimique). Dans le système métabolique cellulaire, depuis les premières phases de régulation de la synthèse des enzymes jusqu’au opérations de synthèse de l’ARN messager et sa traduction en séquences polypeptidiques, on constate que les protéines sont douées de propriétés de reconnaissance stéréospécifiques différentielles, c’est-à-dire que les interactions chimiques à l’échelle microscopique sont librement choisies et régulées. Il faut y voir la source ultime de l’autodétermination qui caractérise les êtres vivants.

Au niveau macroscopique, d’un autre côté, les êtres vivants peuvent se différencier des machines en ce qu’ils se construisent par eux-mêmes. Nous chercherons dans les structures primaires des protéines le “ secret ” de ces propriétés cognitives qui en font les démons de Maxwell, animateurs et constructeurs des systèmes vivants. Traducteur remarquable de l’ADN, le ribosome est doté de la capacité de se reconstituer spontanément. Ceci se traduit par un assemblage stéréospécifique spontané de différents constituants protéiniques qui, répondant en cela à un processus dit “ épigénétique ”, et génère à partir de molécules monomériques, dépourvues de toute symétrie, des molécules plus grosses, d’un degré d’ordre supérieur acquérant du même coup des propriétés fonctionnelles auparavant totalement absentes. La construction épigénétique d’une structure moléculaire vivante n’est pas une création, mais une révélation. Les embryologistes, pour rendre compte notamment des phénomènes de régénération, ont introduit la notion de “ champ morphogénétique ” ou de “ gradient ”, qui enrichit la notion d’interactions stéréospécifiques d’hypothèses cinétiques.

C’est la coopération d’un très grand nombre d’interactions non-covalentes intramoléculaires qui stabilisent la structure fonctionnelle, qui permet à la protéine de former électivement des complexes stéréospécifiques (également non-covalents) avec d’autres molécules. L’enrichissement d’information provient de ce que l’information génétique (représentée par la séquence) impose une interprétation univoque d’un message a priori partiellement équivoque. Ce qui nous intéresse alors, c’est l’ontogenèse, le mode de formation de cette conformation particulière, unique, à quoi est attachée la fonction cognitive d’une protéine. Lorsqu’on examine en détail les mécanismes de l’épigénèse moléculaire, générateur d’ordre (donc de méguentropie ou entropie négative), on constate que parmi les radicaux amino-acides constituant la séquence d’une fibre polypeptidique, la moitié environ sont “ hydrophobes ” et tendent à se rassembler en libérant des molécules d’eau immobilisées à leur contact et qui vont de fait, accroître le désordre, donc l’entropie du système.

J. Monod démontre que la loi générale de l’assemblage des protéines globulaires (c’est-à-dire la séquence des amino-acides dans un polypeptide) est celle du hasard. Il faut admettre que la séquence “ au hasard ” de chaque protéine est en fait, reproduite des milliers ou des millions de fois dans chaque organisme, chaque cellule, à chaque génération, par un mécanisme de haute fidélité qui assure l’invariance des structures. Le message ainsi porté par une séquence de radicaux dans une fibre polypeptidique, qui semble ainsi écrit au hasard, est pour autant chargé d’un sens téléonomique de la structure globulaire, traduction à trois dimensions de la séquence linéaire. Dans l’ontogenèse d’une protéine fonctionnelle, le hasard ainsi capté, conservé, reproduit par la machinerie de l’invariance et ainsi converti en ordre, règle, donc nécessité.

Invariance et perturbations – L’évolution

Toute loi physique spécifie une relation d’invariance. Il en va ainsi de l’identité de deux atomes se trouvant au même état quantique. Les invariants chimiques découlent des mêmes deux classes principales de macromolécules chez tous les êtres vivants : les protéines et les acides nucléiques. Sur le plan du métabolisme, de nombreuses variantes se rencontrent, correspondant à diverses adaptations fonctionnelles, mais consistent cependant en des utilisations nouvelles de séquences métaboliques universelles, d’abord employées à d’autres fonctions. Ainsi, si chimiquement, les constituants sont les mêmes, c’est l’ADN qui assure l’invariance de l’espèce face à la prodigieuse diversité morphologique et physiologique qui pourrait découler de la combinaison de ces constituants primaires. La définition du gène comme porteur invariant des traits héréditaires, au travers des mécanismes de réplication et de traduction, complète et éclaire ainsi d’un jour nouveau la théorie de l’évolution sélective.
 
Le code génétique est écrit dans un langage stéréochimique dont chaque lettre est constituée par une séquence de trois nucléotides (triplet) dans l’ADN spécifiant un acide aminé (parmi vingt possibles) dans le polypeptide. Il n’existe cependant aucune relation stérique directe entre le triplet codant et l’acide aminé codé. Ainsi ce code universel dans la biosphère, paraît chimiquement arbitraire, en ce sens que le transfert d’information pourrait tout aussi bien avoir lieu selon une autre conversion. On connaît ainsi l’effet de certaines mutations qui altèrent la structure de certains composants du mécanisme de traduction, donc modifie la convention régnante, et portent préjudice à l’organisme. Le mécanisme de traduction d’information séquentielle dans le sens ADN (ou ARN) à protéine est strictement irréversible, mais ne s’oppose pas pour autant aux évolutions.

Le hasard seul est à la source de toute nouveauté, à la racine même du prodigieux édifice de l’évolution, est devient une notion centrale de la biologie moderne. Une mutation est en soit un événement microscopique, quantique, auquel par conséquent s’applique le principe d’incertitude, donc imprévisible par sa nature même. Mais au lieu de voir cette source de perturbations tuer à terme, la structure, comme dans un système non-vivant, c’est-à-dire non réplicatif, la structure réplicative de l’ADN est à l’origine de l’évolution dans la biosphère et rend compte de sa liberté créatrice. C’est l’appareil téléonomique, tel qu’il fonctionne lorsque s’exprime pour la première fois une mutation qui définit les conditions initiales essentielles de l’admission, temporaire ou définitive, ou du rejet de la tentative née du hasard. C’est de ce fait que l’évolution elle-même paraît accomplir un “ projet ”.

L’évolution dans la biosphère est un processus nécessairement irréversible, et résulte d’un très grand nombre de mutations accumulées et recombinées grâce en particulier au flux génétique promu par la sexualité. Ce processus définit une direction dans le temps, qui est la même que celle qu’impose la loi d’accroissement de l’entropie. Les pressions de sélection qu’exercent sur les organismes les conditions externes ne sont en aucun cas indépendantes des performances téléonomiques caractéristiques de l’espèce. Ce sont ces interactions spécifiques, en partie “ choisies ” par l’organisme, qui déterminent la nature et l’orientation de la pression de sélection qu’il subit. Les grandes articulations de l’évolution ont été dues à l’invasion d’espaces écologiques nouveaux, et il devient évident que la part des performances téléonomiques dans l’orientation de la sélection devient de plus en plus grande à mesure que s’élève le niveau d’organisation donc d’autonomie de l’organisme à l’égard du milieu, y compris de l’être humain en particulier.

C’est d’ailleurs ici que la capacité de communiquer de l’Homme, donc le langage humain, sont selon J. Monod la résultante d’une pression de sélection spécifique orientée, soutenue et continue depuis plusieurs millions d’années. Il y aurait eu selon l’auteur, un couplage très étroit entre l’évolution privilégiée du système nerveux central de l’Homme et celle de la performance unique qui le caractérise, faisant du langage non seulement le produit, mais l’une des conditions initiales de cette évolution. L’usage d’un langage, si primitif fut-il, ne pouvait manquer d’accroître dans des proportions considérables la valeur de survie de l’intelligence, et donc de créer en faveur du développement du cerveau une pression de sélection puissante et orientée. Et si, chez l’enfant, l’acquisition du langage paraît aussi miraculeusement spontanée, c’est qu’il s’inscrit dans la trame même d’un développement épigénétique dont l’une des fonctions est de l’accueillir, autant que de développer la fonction cognitive elle-même.

A suivre.
« Modifié: 25 décembre 2007, 01:19:08 am par Jacques »

JacquesL

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Re : Les créationnistes voudraient bien brûler "Le hasard et la nécessité"
« Réponse #2 le: 25 décembre 2007, 01:14:30 am »
Suite :

Les frontières

On peut a priori définir trois étapes dans le processus conduisant à l’apparition des premiers organismes sur Terre : formation des constituants chimiques essentiels (nucléotides et amino-acides), formation des premières macromolécules capables de réplication, et l’évolution qui a construit un appareil téléonomique pour aboutir à la cellule primitive. L’invariance réplicative de l’ADN constitue donc la cohérence téléonomique des organismes. Mais nous ne sommes pas en mesure de réitérer l’expérience de cette “ soupe prébiotique ” dans laquelle les macromolécules étaient déjà capables de leur propre réplication sans le secours d’aucun appareil téléonomique. D’autre part, les cellules les plus simples qu’il nous soit donné d’étudier n’ont rien de “ primitif ” et sont déjà le produit d’une sélection de plusieurs milliards de générations qui ont pu accumuler un appareillage téléonomique tellement performant que le code génétique n’a pas de sens à moins d’être traduit par des produits issus de la traduction. Quand la boucle s’est-elle bouclée ? L’énigme demeure sur l’origine de la vie. L’hypothèse n’est pas exclue, en effet, par la structure actuelle de la biosphère, que l’événement décisif ne se soit produit qu’une seule fois, et sa probabilité d’apparition devient donc quasi nulle. L’Univers n’était pas gros de la vie, ni la biosphère de l’Homme, quoi de plus normal que de ressentir l’étrangeté de notre condition ?

La résolution de cette énigme de l’évolution pourrait venir de l’étude de notre système nerveux central, comme nous l’avons vu plus haut, mais aucun système logique ne saurait décrire intégralement sa propre structure. Nous ne pourrons donc faire que des approches exploratoires, en particulier sur l’interprétation de la transmission synaptique en termes d’interactions moléculaires ou des propriétés du neurone comme intégrateur de signaux de nombreuses autres cellules (capable d’additionner ou de soustraire différents signaux en tenant compte de leur coïncidence dans le temps, et de modifier la fréquence des signaux qu’il émet en fonction de l’amplitude de ceux qu’il reçoit). Le raffinement des fonctions cognitives chez l’Homme intègre différentes caractéristiques : assurer la commande, contenir des programmes d’action plus ou moins complexes, analyser et filtrer les informations pour construire une représentation du monde extérieur, enregistrer les évènements significatifs, et imaginer. Ces éléments sont, de plus, autant innés qu’acquis d’après l’auteur, qui rejette de fait l’opposition entre ces deux écoles de pensées scientifiques. Enfin, il rappelle la frontière infranchissable pour l’instant, de l’introspection, la notion de cerveau et celle d’esprit ne se confondant pas plus pour nous dans le vécu actuel que celui de nos ancêtres.

Proposition sur l’évolution de l’Homme

C’est le pouvoir de simulation,  sur quoi le langage repose en grande partie, couplé à la capacité d’être témoin de soi-même (la conscience), qui différencient l’Homme même des animaux supérieurs selon l’auteur. L’animal le plus intelligent, capable sans doute de simulation subjective, ne dispose d’aucun moyen de “ libérer sa conscience ”. L’Homme sait communiquer et partager autant des expériences concrètes que simulées, ses idées, et il faut penser que l’évolution idéelle n’a précédé que de peu l’évolution physique dans une incroyable symbiose évolutive. Influencé autant qu’il influence son environnement, le comportement de l’Homme a orienté la pression de sélection (en particulier par le biais des guerres d’ailleurs). Dès que le comportement cesse d’être automatique pour devenir culturel, les traits culturels eux-mêmes influence l’évolution sélective du génome humain. Il devient évident que dans nos sociétés modernes, la sélection n’a plus rien de “ naturelle ” au sens darwinien du terme, ni pour nous, ni pour les être vivants directement ou indirectement sous notre influence comportementale.  C’est ici, rappelle l’auteur, qu’il nous faudra rester vigilants à ne pas jouer avec la nature, et tant que les progrès de la science ne permettront pas de corriger certaines tares lourdes génétiques des individus, ne pas vouloir procéder à des jeux de sélections non naturelles et orientées.

J. Monod constate également un certain mal de l’âme de nos civilisations modernes, qui selon lui vient du prodigieux développement de la connaissance depuis ces derniers siècles, et qui contraint aujourd’hui l’homme à une révision déchirante de la conception, enracinée depuis des milliers d’années, qu’il se faisait de lui-même et de sa relation avec l’univers. La valeur de performance d’une idée tient à la modification du comportement qu’elle apporte à l’individu ou au groupe qui l’adopte. Face aux explications mythiques (ou religieuses) qui assurent encore aujourd’hui la cohésion d’un groupe, et donc en conséquence l’importance sélective qu’assume la structure sociale fondée sur les traditions (“ on ne refait pas l’histoire ! ”), il fallut tant de millénaires pour que paraisse dans le royaume des idées celle de la connaissance objective comme seule source de vérité authentique. La science, fondée sur le postulat d’objectivité, a conquis sa place dans la société, mais pas encore dans les âmes désespérément attachées à la tradition animiste selon l’auteur.

L’Homme est en marge de l’univers, où il doit vivre, et se retourne soit vers la science, source de connaissance et de création, soit contre la science, source aussi de destruction non seulement des corps mais de l’âme elle-même. La connaissance est exclusive de tout jugement de valeur, tandis que l’éthique est par essence non objective. La notion d’authenticité devient le domaine commun où se recouvrent éthique et connaissance, où les valeurs (et croyances) et la vérité associées mais non confondues révèlent leur entière signification à l’homme attentif qui en éprouve la résonance. L’éthique de la connaissance, créatrice autant que révélatrice du monde moderne, est la seule capable selon J. Monod de guider son évolution, pour lui permettre de choisir entre le Royaume et les ténèbres.
« Modifié: 25 décembre 2007, 01:19:53 am par Jacques »

JacquesL

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"animisme" au sens de J.Monod :
« Réponse #3 le: 25 décembre 2007, 06:34:09 pm »
Précision demandée : l'"animisme" au sens de J.Monod ?

Nos ancêtres comprenaient bien que les plantes et les animaux avaient bien des choses en commun avec eux. Les plantes croissent et se poussent vers le Soleil, sont en compétition pour les ressources, dont l'ensoleillement. Les animaux mangent, attrapent des proies, échappent aux prédateurs, les mâle se battent pour les femelles, les femelles choisissent les mâles les plus dominants et les plus prometteurs. Donc tous les êtres vivants ont les mêmes projets.

Ce qui leur posait problème, c'était tout ce qui est inanimé, qui n'est dû qu'à des forces naturelles brutes, sans code génétique support d'un projet. Ils s'en sont tirés en décidant que tout l'inanimé était animé quand même, avec des elfes, des sylfes, des gnomes, de dieux et des génies partout...
Marx et Engels firent de même, en postulant que l'Univers entier était soumis à une dialectique et un "sens de l'histoire". C'était là encore une projection animiste. D'où le succès de cette religion, pour ces raisons inavouables.

Renversement d'attitude à la naissance du comportement scientifique, 16e siècle : nous sommes subjectifs, mais la nature est objective, et l'inanimé n'a pas d'intentions. Ni même de "sens de l'histoire", ni de "point oméga" à la Theillard.

JacquesL

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Inquiétudes féminines : Pas bien ? mon animisme à moi que j'ai ?
« Réponse #4 le: 29 décembre 2007, 10:58:38 am »
Inquiétudes féminines : Pas bien ? mon animisme à moi que j'ai ?

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Quel mal y a t'il à être animiste?...La Vie...c'est à dire Dieu...

est ce qui anime.

Tout ce qui m'entoure est vivant...Ma voiture s'appelle Naphtaline

et mon chien Socrate...C'est la preuve qu'ils sont animés et

vivants...  :D ...  :D ...  :D

Xerxes (-519 ; -465) était entièrement de ton avis : il fit fouetter la mer pour la punir d'avoir, dans une tempête, rompu son pont de bateaux sur l'Hellespont : -480.

Sur Byte, dans les années 80, au temps où on avait encore des ordis sous CP/M, on a eu aussi un chroniqueur qui donnait un prénom à chacun de ses ordis ("Zeke" par exemple), à son grille-pain, à son rasoir, à ses imprimantes, etc...

Trois autres exemples de dérive animiste courantes :

1 - En 1964, quand j'étais G.O. (Gentil Organisateur), moniteur de voile au Club Med, une des GM ne pouvait tolérer aucune de mes explications et instructions techniques. En effet, un voilier est une machine simple : une ou deux surfaces portantes dans un fluide, l'eau, et deux surfaces portantes dans un autre fluide, les voiles dans l'air, et un mouvement relatif des deux fluides entre eux. Mouvement qui peut être turbulent, voire fantasque pour le vent en eaux intérieures, mais pas dans notre golfe de Santa Julia en Corse. Dans le Golfe du Morbihan, les mouvements de l'eau, les courants de marée peuvent être aussi violents que dans une rivière torrentielle à kayaks, mais encore une fois, pas en Méditerranée, en Corse, dans une baie ronde. Et pourtant cette femme ne tolérait aucun énoncé de la part du moniteur, qui fut en terme de mécanique de ladite machine simple ; il lui fallait qu'elle reformulât tout en termes de psychologie des profondeurs :
"Alors au fond, ...."
Et évidemment sa reformulation n'avait ni queue ni tête. Sa façon de régler ses voiles et de naviguer demeura consternante, elle aussi.

2 - Quand les ordinateurs ont commencé d'arriver dans les bureaux des clercs et clergesses de notaires, nombreuses furent les employées qui n'ont pas toléré que ces caisses mystérieuses fussent des machines, et ont remplacé les instructions reçues lors de la session de formation, par de la psychologie des profondeurs, par des hypothèses sur les intentions cachées et perverses des dites machines.
Le résultat, j'vous raconte pas...

Remarquez, il arrivait que les programmeurs en rajoutent malicieusement une couche. En 1981, le Goupil II, celui qui était sous Flex (processeur Motorola 6802 ou 6809) et dont la tôle avait une jolie couleur carotte, quand on voulait effacer un fichier, demandait confirmation de la manoeuvre. Jusqu'ici, rien que de normal. Mais si vous changiez d'avis, et infirmiez votre ordre d'effacement, le système affichait alors :
"Je m'en doutais !"...  ;D

3 - Aux usines Renault, une grande partie du personnel n'avait aucune formation initiale, était illettré, venait directement de leurs pauvres champs au Portugal, en Tunisie, ou d'Afrique. Cet ouvrier noir, on lui propose de changer de poste, d'une vieille machine bruyante et dangereuse, vers une machine plus moderne, plus propre, mieux sécurisée et moins bruyante. Des gains partout quant aux conditions de travail. Pourtant, il refuse. Il risque le licenciement. On trouve un autre ouvrier de la même ethnie, et on lui demande de servir d'interprète, qui explique alors au contremaître que son collègue n'est pas protégé contre la nouvelle machine. Il a donc fallu qu'il aille trouver le marabout, qui lui fasse un nouveau grigri, pour le protéger des esprits malfaisants de la nouvelle machine.
Voilà !

Heureusement, les machines ne sont pas conçues par des animistes, mais par des ingénieurs.


L'analyse est plus délicate, dans les cas où la réalité est mixte, quand on étudie des automatismes de groupe : chacun des gens est bien vivant, a bien des intentions, dont une large part échappe à l'introspection - si elle existait -, demeure inconscientes ; plus exactement, chacun a bien des projets internes, comme tout être vivant (survivre, agrandir son territoire, se reproduire). Mais les interactions entre eux peuvent échapper aux formulations d'intentions ; à certains égard c'est une machinerie sociale. Ainsi, la cuisine noire d'un groupe en régression d'attaque-fuite le fait réagir en paranoïaque collectif, aussi méfiant et paniquard qu'une troupe de vanneaux huppés, qui s'envolent tous dès que le plus craintif d'entre eux panique et s'envole. La dite cuisine noire aboutit régulièrement à ce que le plus paranoïaque du groupe devienne son porte-parole et son leader, aussi longtemps que la peur est le sentiment dominant.

Ainsi, nombreux sont les "complots" qui ne sont pas consciemment complotés, où la plupart des acteurs sont simplement prisonniers de leurs automatismes. Prenons l'exemple d'un groupe qui harcèle à mort le bouc émissaire du jour : le complot fonctionne, sous la direction du plus pervers d'entre eux, les autres sont juste incapables de prendre du recul envers leurs propres terreurs et leurs propres compromissions dans un crime collectif qui échappe à leur entendement. Même le pervers dominant, souvent ne comprend pas ce qu'il fait, il le fait parce qu'il ne sait rien faire d'autre, il a été élevé comme ça.

JacquesL

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Trois pressions de sélections très divergentes.
« Réponse #5 le: 07 janvier 2008, 01:35:47 am »
Citation de: yalbmert99
... et voici australopithecus africanus :




http://wiki.cotch.net/index.php/Australopithecus_africanus
Merci à Yalbmert99 d'avoir donné ce lien sur evowiki.org.

Donc dès la découverte de ce fossile par Dart en 1924, a été mis en évidence que la bipédie et le changement de dentition et de régime ont amplement précédé l'encéphalisation de notre lignée.

Une autre modification très importante n'est pas expliquée au grand public, c'est celle du bassin des femmes (qui se fossilise) et celle de la musculature du col de l'utérus (qui ne se fossilise pas).

Chez les chimpanzés et les bonobos, les différences secondaires entre les sexes sont peu marquées.
Chez les gorilles, les orang outans et les babouins, ce sont les mâles qui ont subi l'essentiel de la pression de sélection sexuelle : ils ont été sélectionnés sur un physique impressionnant, prouvant leur capacité à défendre le territoire et les ressources alimentaires.

Au bout de la lignée humaine, nous voyons l'aboutissement d'une pression de sélection à l'opposé : la femelle humaine est très visiblement et ostensiblement femelle. Bien plus que chez les chevaux, par exemple, où la jument est très semblable à l'étalon. Chez nous, elle est très ostensiblement  femelle, alors que le mâle ne se singularise que peu. C'est un phénomène unique, sans aucun équivalent chez les vertébrés. Chez les oiseaux, soit les sexes sont semblables, soit le mâle est très orné. Chez les rapaces diurnes, la femelle est plus forte, et domine le couple : c'est utile pour que la femelle rapte les proies rapportées par le mâle tandis qu'elle couve les oeufs. Mais elle n'est pas plus ornée que le mâle.

Cette particularité humaine s'explique par deux autres faits spécifiques à notre lignée : la bipédie totale, et l'encéphalisation croissante.
L'utérus humain est donc le seul sac qui se porte avec l'ouverture en bas. Ce qui impose une musculature accrue autour du col de l'utérus, jamais rencontrée chez les quadrupèdes. Cela imposait aussi des modifications du bassin, plus large et plus porteur.

Pendant ce temps là, la pression de sélection vers l'encéphalisation - due assez largement à un progrès constant vers toujours plus de langage articulé, dont hélas surtout du commérage - conduisant à allonger la gestation, et à augmenter la néoténie dans notre lignée. C'est à dire que nos femmes gardent les foetus plus longtemps, pour poursuivre plus longtemps la croissance neuronale du cerveau. Et par ailleurs, avec leurs crânes toujours plus gros, nos bébés sont nés de plus en plus immatures et dépendants, et leurs cerveaux poursuivent leur maturation pendant plusieurs mois après naissance, avec un développement moteur retardé. Un marcassin trotte tout de suite ; il faut de sept à quinze mois à nos bébés pour marcher. Toutes ces évolutions pour favoriser cette encéphalisation phénoménale.

Du coup, la parturition, la mise au monde de ces bébés au crâne toujours plus gros, devenait de plus en plus difficile, exceptionnellement difficile, jusqu'à devenir ce danger majeur qu'il est actuellement pour nos femmes et nos bébés : la plupart réussissent, mais en passant bien souvent près de la mort. Là encore, ceci est spécifique à la lignée humaine : c'est à l'accouchement que cette espèce réside tout au bord de ses limites.

Comment les mutations hasardeuses ont-elles été sélectionnées en ce sens ?
D'une part par la méthode brutale et radicale : la femme au bassin étroit qui tentait de mettre au monde un bébé au crâne large, risquait d'en mourir, et en mourait parfois. D'où extinction des lignées à bassin étroit, à mesure que les crânes des bébés croissaient.
D'autre part par sélection sexuelle proprement dite. A l'heure actuelle, les femmes qui attirent infailliblement nos regards de mâles, ont des mensurations que nous percevons comme très féminines : hanches larges, contrastant avec une taille fine si elle est jeune... Ce qui est maintenant bien établi, a bien dû commencer doucement, mais se poursuivre au fil du dernier million d'années environ : avaient plus de succès sexuel les femmes donnant un signal social sexuel évident, à bassin large en contraste avec la taille, donc elles pouvaient sélectionner les mâles les plus dominants et prometteurs, donnant plus de nourriture, plus de territoire, plus de sécurité... au final plus de succès reproducteur.

Les seins ne se fossilisent pas, aussi nous ignorons tout d'une autre évolution dont nous constatons actuellement l'aboutissement : nos femelles ont des mamelles fort évidentes, même lorsqu'elles n'allaitent pas. On ne va pas revenir sur la pression de sélection sexuelle, encore une fois spécifique à la lignée humaine. Vous avez suffisamment compris comment elle fonctionne, ce que sont les signaux sociaux sexuels, dans notre espèce comme dans les autres. Encore que chez nous les blancs habillés, le signal coloré du mamelon de la jeune femme nubile est faible et peu évident ; chez les noirs, et notamment chez les femmes boshiman, qui exhibent deux fleurs rouges fort provoquantes, il en va tout autrement.

Mais voici une conséquence à laquelle vous n'aviez pas pensé :
Hormones sexuelles et connectivité cérebelleuse.
http://deonto-famille.info/index.php?topic=70.0
Citer
Mettez bout à bout deux informations, dont la seconde est triviale, et vous voyez s'ouvrir devant vous un beau programme de recherches :

Première info :
Psychologue clinicien, c'est un métier où une part vitale du diagnostic repose sur des outils non-scientifiques par nature. Notamment, l'incontournable analyse du contre-transfert : "Qu'est-ce qu'il/elle me fait ressentir, et pourquoi ?"

C'est incontournable, et il faut faire avec. Il faut donc des encadrements pour discipliner ce contre-transferts et ses pièges. Un psychologue doit se faire superviser par un collègue sénior. Il doit se contrôler lui-même par écrit, heure par heure. Enfin, il est bon que le client aussi ait des idées les plus claire possibles sur ce qu'il demande. Mais ce dernier point est normalement de loin le plus déficient, sinon chacun saurait se débrouiller seul, sans psychologue. On en est loin... "Mes clients sont illogiques, sinon, ils ne seraient pas dans mon cabinet", souriait MHE.

Mais en plus, sera très avantagé celui qui observe aussi très finement avec son hémicortex gauche, les détails des gestes, du rythme respiratoire, les fines articulations de la prosodie... et qui peut les manier à son tour en parfaite maîtrise. Là se situe la différence entre l'honnête psychologue et le génie.
Détecter un travesti à l'absence d'arrondi de son geste de main droite pour épousseter une poussière sur sa manche gauche, voilà le génie. Depuis que Milton Erickson nous a révélé ce fait d'observation, nous savons que toute femme, et même toute fillette dont la poitrine va pousser, arrondit ses gestes autour de sa future poitrine. Un mâle jamais.

Seconde info :
Tout prof qui a enseigné à des élèves de 4e française, donc âgés de 12 à 15 ans, a été frappé par l'énorme divergence entre les écritures de filles et les écritures de garçons, à cet âge. L'écriture des filles est envahie de ronds partout. Même les points sur les i deviennent des cercles.
Alors que l'écriture des garçons, fine et irrégulière, allant droit à l'essentiel, trahit souvent l'insécurité partout dans l'espace de la feuille, l'écriture des filles du même âge occupe l'espace de la feuille avec régularité, avec la sécurité de la propriétaire.


Début de conclusions : les hormones sexuelles agissent sur le développement et la connectivité du cervelet. Le cervelet, ce grand oublié des recherches en psychobiologie !

OK ! On fait le programme de recherches ? On commence par quel bout ?

Cette évolution-là aussi nous est spécifique.
« Modifié: 08 septembre 2011, 12:41:10 am par JacquesL »

Mateo

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Re : Les créationnistes voudraient bien brûler "Le hasard et la nécessité"
« Réponse #6 le: 11 janvier 2008, 12:24:47 pm »
Salut Jacques,

j'ai lu il y a 20 ans "Le hasard et la nécessité" de Jacques Monod et j'en garde un excellent souvenir d'une explication scientifique (et claire) de la théorie de l'évolution, (sans la nécessité d'invoquer Dieu).

Je n'ai pas (encore) lu en détail ton article sur ce livre, mais je suppose que tu as relevé une des erreurs qui y figure : vers la fin du livre, il affirme qu'il ne sera jamais possible de faire de manipulations génétiques, et relativement peu d'années plus tard, les faits l'ont contredit, mais l'ensemble du livre reste intéressant à mon avis.
Mateo
Axiomatique de collège : http://www.mathemagique.com

JacquesL

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Salut Jacques,

j'ai lu il y a 20 ans "Le hasard et la nécessité" de Jacques Monod et j'en garde un excellent souvenir d'une explication scientifique (et claire) de la théorie de l'évolution, (sans la nécessité d'invoquer Dieu).

Je n'ai pas (encore) lu en détail ton article sur ce livre, mais je suppose que tu as relevé une des erreurs qui y figure : vers la fin du livre, il affirme qu'il ne sera jamais possible de faire de manipulations génétiques, et relativement peu d'années plus tard, les faits l'ont contredit, mais l'ensemble du livre reste intéressant à mon avis.

Matéo, tu te faisais bien rare...
Oui, j'ai signalé la parution du premier article sur une transcriptase inverse, l'année même de parution du Hasard et la nécessité, en 1970. Ou plutôt j'ai signalé qu'un autre l'a signalé, car je ne suis pas du tout dans la spécialité.

Ce qui est immensément précieux dans ce livre, c'est le rappel transdisciplinaire de l'exigence de l'objectivité en sciences. Or depuis 1927, celle-ci était totalement répudiée par la clique des vainqueurs du congrès Solvay 1927.
La tentation du retour au subjectivisme, et ses conséquences.
ou http://deonto-famille.org/citoyens/debattre/index.php?topic=48.msg980#msg980
« Modifié: 23 mai 2008, 07:52:52 pm par Jacques »

JacquesL

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Et la néoténie se poursuit ainsi à présent :
« Réponse #8 le: 17 janvier 2008, 08:19:35 am »
Une autre modification très importante n'est pas expliquée au grand public, c'est celle du bassin des femmes (qui se fossilise) et celle de la musculature du col de l'utérus (qui ne se fossilise pas).

Chez les chimpanzés et les bonobos, les différences secondaires entre les sexes sont peu marquées.
Chez les gorilles, les orang outans et les babouins, ce sont les mâles qui ont subi l'essentiel de la pression de sélection sexuelle : ils ont été sélectionnés sur un physique impressionnant, prouvant leur capacité à défendre le territoire et les ressources alimentaires.

Au bout de la lignée humaine, nous voyons l'aboutissement d'une pression de sélection à l'opposé : la femelle humaine est très visiblement et ostensiblement femelle. Bien plus que chez les chevaux, par exemple, où la jument est très semblable à l'étalon. Chez nous, elle est très ostensiblement  femelle, alors que le mâle ne se singularise que peu. C'est un phénomène unique, sans aucun équivalent chez les vertébrés. Chez les oiseaux, soit les sexes sont semblables, soit le mâle est très orné. Chez les rapaces diurnes, la femelle est plus forte, et domine le couple : c'est utile pour que la femelle rapte les proies rapportées par le mâle tandis qu'elle couve les oeufs. Mais elle n'est pas plus ornée que le mâle.

Cette particularité humaine s'explique par deux autres faits spécifiques à notre lignée : la bipédie totale, et l'encéphalisation croissante.
L'utérus humain est donc le seul sac qui se porte avec l'ouverture en bas. Ce qui impose une musculature accrue autour du col de l'utérus, jamais rencontrée chez les quadrupèdes. Cela imposait aussi des modifications du bassin, plus large et plus porteur.

Pendant ce temps là, la pression de sélection vers l'encéphalisation - due assez largement à un progrès constant vers toujours plus de langage articulé, dont hélas surtout du commérage - conduisant à allonger la gestation, et à augmenter la néoténie dans notre lignée. C'est à dire que nos femmes gardent les foetus plus longtemps, pour poursuivre plus longtemps la croissance neuronale du cerveau. Et par ailleurs, avec leurs crânes toujours plus gros, nos bébés sont nés de plus en plus immatures et dépendants, et leurs cerveaux poursuivent leur maturation pendant plusieurs mois après naissance, avec un développement moteur retardé. Un marcassin trotte tout de suite ; il faut de sept à quinze mois à nos bébés pour marcher. Toutes ces évolutions pour favoriser cette encéphalisation phénoménale.

Du coup, la parturition, la mise au monde de ces bébés au crâne toujours plus gros, devenait de plus en plus difficile, exceptionnellement difficile, jusqu'à devenir ce danger majeur qu'il est actuellement pour nos femmes et nos bébés : la plupart réussissent, mais en passant bien souvent près de la mort. Là encore, ceci est spécifique à la lignée humaine : c'est à l'accouchement que cette espèce réside tout au bord de ses limites.

Comment les mutations hasardeuses ont-elles été sélectionnées en ce sens ?
D'une part par la méthode brutale et radicale : la femme au bassin étroit qui tentait de mettre au monde un bébé au crâne large, risquait d'en mourir, et en mourait parfois. D'où extinction des lignées à bassin étroit, à mesure que les crânes des bébés croissaient.
D'autre part par sélection sexuelle proprement dite. A l'heure actuelle, les femmes qui attirent infailliblement nos regards de mâles, ont des mensurations que nous percevons comme très féminines : hanches larges, contrastant avec une taille fine si elle est jeune... Ce qui est maintenant bien établi, a bien dû commencer doucement, mais se poursuivre au fil du dernier million d'années environ : avaient plus de succès sexuel les femmes donnant un signal social sexuel évident, à bassin large en contraste avec la taille, donc elles pouvaient sélectionner les mâles les plus dominants et prometteurs, donnant plus de nourriture, plus de territoire, plus de sécurité... au final plus de succès reproducteur.

Les seins ne se fossilisent pas, aussi nous ignorons tout d'une autre évolution dont nous constatons actuellement l'aboutissement : nos femelles ont des mamelles fort évidentes, même lorsqu'elles n'allaitent pas. On ne va pas revenir sur la pression de sélection sexuelle, encore une fois spécifique à la lignée humaine. Vous avez suffisamment compris comment elle fonctionne, ce que sont les signaux sociaux sexuels, dans notre espèce comme dans les autres. Encore que chez nous les blancs habillés, le signal coloré du mamelon de la jeune femme nubile est faible et peu évident ; chez les noirs, et notamment chez les femmes boshiman, qui exhibent deux fleurs rouges fort provoquantes, il en va tout autrement.

Mais voici une conséquence à laquelle vous n'aviez pas pensé :
Hormones sexuelles et connectivité cérebelleuse.
http://deonto-famille.info/index.php?topic=70.0

Citer
Mettez bout à bout deux informations, dont la seconde est triviale, et vous voyez s'ouvrir devant vous un beau programme de recherches :

Première info :
Psychologue clinicien, c'est un métier où une part vitale du diagnostic repose sur des outils non-scientifiques par nature. Notamment, l'incontournable analyse du contre-transfert : "Qu'est-ce qu'il/elle me fait ressentir, et pourquoi ?"

C'est incontournable, et il faut faire avec. Il faut donc des encadrements pour discipliner ce contre-transferts et ses pièges. Un psychologue doit se faire superviser par un collègue sénior. Il doit se contrôler lui-même par écrit, heure par heure. Enfin, il est bon que le client aussi ait des idées les plus claire possibles sur ce qu'il demande. Mais ce dernier point est normalement de loin le plus déficient, sinon chacun saurait se débrouiller seul, sans psychologue. On en est loin... "Mes clients sont illogiques, sinon, ils ne seraient pas dans mon cabinet", souriait MHE.

Mais en plus, sera très avantagé celui qui observe aussi très finement avec son hémicortex gauche, les détails des gestes, du rythme respiratoire, les fines articulations de la prosodie... et qui peut les manier à son tour en parfaite maîtrise. Là se situe la différence entre l'honnête psychologue et le génie.
Détecter un travesti à l'absence d'arrondi de son geste de main droite pour épousseter une poussière sur sa manche gauche, voilà le génie. Depuis que Milton Erickson nous a révélé ce fait d'observation, nous savons que toute femme, et même toute fillette dont la poitrine va pousser, arrondit ses gestes autour de sa future poitrine. Un mâle jamais.

Seconde info :
Tout prof qui a enseigné à des élèves de 4e française, donc âgés de 12 à 15 ans, a été frappé par l'énorme divergence entre les écritures de filles et les écritures de garçons, à cet âge. L'écriture des filles est envahie de ronds partout. Même les points sur les i deviennent des cercles.
Alors que l'écriture des garçons, fine et irrégulière, allant droit à l'essentiel, trahit souvent l'insécurité partout dans l'espace de la feuille, l'écriture des filles du même âge occupe l'espace de la feuille avec régularité, avec la sécurité de la propriétaire.


Début de conclusions : les hormones sexuelles agissent sur le développement et la connectivité du cervelet. Le cervelet, ce grand oublié des recherches en psychobiologie !

OK ! On fait le programme de recherches ? On commence par quel bout ?

Cette évolution-là aussi nous est spécifique.

Et la néoténie se poursuit sous nos yeux, est signalée par tout l'encadrement médical scolaire (médecins scolaires et infirmières scolaires) et par les enseignants eux-mêmes : les fillettes ont leurs règles de plus en plus jeunes. Nous avons dans les écoles des fillettes de neuf ans, qui sont réglées. Que va-t-on en faire ? Voilà des cerveaux dont la myélinisation est inachevée, qui n'ont encore accès à aucune des réflexivités qui se conquièrent à l'adolescence, qui n'ont pas encore accès à la logique formelle, ni à l'abstraction autonome, mais dont la croissance différenciée est dominée par les hormones sexuelles. Nos professeures de psychologie sont discrètes - voire ignorantes à la date du cours que j'ai enregistré ? - sur le destin de ces femmes précoces, mais hélas je suis le témoin privilégié des conséquences d'une féminisation trop précoce, j'ai même pu comparer deux destins de filles. Celle à la féminisation précoce ne s'est plus préoccupée que de manipuler l'instinct sexuel des garçons, dans une attraction-haine gorgée de mépris, a saboté ses études, n'a jamais pu achever aucune première année post-bac, dans une problématique incestuelle à tendances de plus en plus incestueuses s'est vite enfermée dans un comportement histrionique, oscillant entre "Il faut que je séduise papa" et "si je tue papa, elles me récompenseront, et je vivrai pour toujours à leurs crochets". Ce destin d'hystérique exploitée par les tueuses de pères demeure un destin consternant.

Ce qui est généralisable de cet exemple particulier, est l'évolution vers une névrose hystérique. Elles sont facilement condamnées à une hypersexualisation, sans pouvoir en assumer aucune des responsabilités affectives ni matérielles, à séduire sans aimer ni même s'attacher, à ne tenir aucune des promesses sexuelles qu'elles multiplient.

Autre témoignage historique de l'avancement séculaire de la puberté, chez les filles comme chez les garçons : celui des musiciens. Au 18e siècle, Johan Sebastian Bach pouvait faire chanter des garçons de quatorze à quinze ans en soprano : leurs voix n'avaient pas encore mué, et ils avaient une solide expérience musicale, pouvaient tenir leur partie dans des partitions complexes et pleines d'intérêt.

C'est exactement cela la néoténie : la maturité sexuelle et la capacité de se reproduire, en avance sur les autres évolutions physiques.

Bon, alors, devant cette constatation indiscutable de la poursuite de l'évolution néoténique, comment vont réagir divers militants fanatiques, engagés dans un déni psychotique de la réalité ?

Les féminazies vont hurler au complot masculiniste, vous expliquer que tout ça, c'est la faute du patriarcat. Pour elles, toute différenciation sexuelle dans l'espèce humaine est la faute du patriarcat qu'il faut abattre, et à mort tous ces salauds de mâles !

Les créationnistes hurlent au complot des sans-dieu, des matérialistes athées, que la fin du monde est proche sous le règne de l'antéchrist... Comment supporteraient-ils une preuve aussi évidente que l'évolution de l'espèce humaine se poursuit sous nos yeux ? Bin oui, quoi à la fin ! C'est leur dieu qui conduit toutes choses personnellement, et toute preuve de l'évolution naturelle ou dirigée, est une offense personnelle à sa Création à lui qu'il a...

Ma soeur hurle que mon témoignage de père est invalide "parce que tu y étais, donc tu n'es pas objectif !", et que "de toutes façons, tu n'as pas le droit d'ouvrir la bouche sur quoi que ce soit, car tu n'es même pas psychanalysé, alors !"...

Autres variantes ?
A vous la parole !
« Modifié: 08 septembre 2011, 12:40:25 am par JacquesL »

JacquesL

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Néoténie : le sexe n'attend pas la tête...
« Réponse #9 le: 04 mai 2011, 01:45:13 pm »
http://www.zigonet.com/accouchement/a-12-ans-elle-accouche-d-039-une-petite-fille-en-plein-voyage-scolaire_art21110.html
http://www.europe1.fr/International/Pays-Bas-elle-accouche-a-12-ans-476071/
...

Citer
Une écolière néerlandaise de 12 ans originaire de Groningen, dans le Nord des Pays-Bas, a accouché d'une fillette au cours d'une excursion scolaire, a-t-on appris mardi auprès du Service local de santé publique (GGD).

"Tant l'adolescente que sa famille ne s'étaient pas rendus compte de la grossesse, qu'aucun signe extérieur ne trahissait", a déclaré à Cyriel Hamstra, porte-parole du GGD, ajoutant ignorer de combien de mois l'écolière était enceinte.

L'adolescente participait, le 22 mars, à une journée de détente avec ses camarades de classe lorsqu'elle a ressenti de violentes douleurs au ventre, a raconté Cyriel Hamstra. Un accompagnateur jugeant ces douleurs suspectes a aussitôt alerté les services de secours d'urgence.

Arrivés sur place, les ambulanciers ont constaté que l'écolière était sur le point d'accoucher. Ils ont immédiatement emmené la patiente dans un bâtiment proche du site de l'excursion, où elle a mis au monde une petite fille.

La mère et l'enfant "se portent bien", a souligné Cyriel Hamstra. Un tuteur a été chargé de veiller au bien-être du nouveau-né, a expliqué Cyriel Hamstra, selon lequel il s'agit d'une procédure normale aux Pays-Bas en pareil cas.

Néoténie : comme quoi le sexe n'attend pas la tête...

Tout ça, c'est encore la faute de ces osties d'pourris d'masculinistes, moi j'vous dis !