Bonjour,
Je me permets de copier-coller un article de Louis Peretz de Manosque, trouvé sur le site de Pedro Miras (
http://www.pierrebelle.org/article.php?id_article=71 ), (qui veut moderniser la démocratie participative) :
--- citation Louis Peretz de Manosque ---
Chapitre XI - POUR UNE « A-CROISSANCE » SOUTENABLE
Il n’est plus possible de nos jours d’ignorer les problèmes écologiques à l’échelle planétaire. Tels que se présentent les progrès économiques des pays développés comme ceux des pays en voie de développement, si rien ne change fondamentalement dans le comportement de « l’homo-aeconomicus », la planète ira à sa perte, de façon inéluctable disent les écologistes.
On constate une augmentation des bouleversements terrestres, et en tout cas de leur intensité : tsunamis, inondations, cyclones, tremblements de terre, etc. Les réserves d’énergie de la planète s’épuisent au fur et à mesure du développement des pays. Le système des échanges d’énergie de combustion se fait toujours avec une perte, si minime soit-elle. Rien ne se crée, une partie se perd…dans la nature.
Peut-on arrêter cette spirale ? Comment changer au moins la forme du développement matériel de nos sociétés, dit durable, sans tomber à l’inverse dans des bouleversements sociaux, qui pourraient nous faire revivre les pires moments des grandes crises ayant amenés aux dernières guerres ? En bref le progrès peut-il devenir un progrès sensé et bénéfique pour tous ?
Actuellement, la plupart des pays occidentaux, pris dans la nasse de la loi des marchés ne semblent plus maîtriser ni la politique, ni l’économie. Certes, le penchant naturel de l’homme est, dès qu’il est sur terre, d’abord de survivre, et de donner par là cours à ses intérêts de base, qui n’ont pas changé depuis la nuit des temps : subvenir à sa nourriture, s’abriter, se vêtir, et se déplacer. En même temps il cherche à diminuer sa souffrance ou plus simplement sa fatigue. De fil en aiguille il veut plus de confort, profiter de la vie et de la nature qui l’entoure.
Ce n’est pas le progrès en tant que tel qui doit être mis en cause, mais le type de croissance matérielle qu’il engendre. Le désir d’aller toujours plus vite, toujours plus loin est une aspiration naturelle, légitime. Les anglo-français ont été fiers d’avoir leur bel oiseau Concorde voler dans le ciel, mais qui transportait-il ? Hommes d’affaires, et de toute façon les nantis. Accepté par de Gaulle, voulu par l’industrie aéronautique, investissement important, il avait l’avantage de fournir du travail sur le long terme. Mais l’échec sur le plan économique que l’on connaît, montre qu’en fait cette solution était contre-productive.
On peut comparer actuellement, ce type d’investissement avec le TGV. Bien sous tous les rapports, pour ses performances technologiques, pour le confort, pour le gain de temps. Mais là encore à qui profite-il ? Mais diront les gestionnaires de la SNCF, il est rentable ! Peut-être, mais en sera-t-il toujours ainsi sur le long terme ? Le problème est de savoir si gagner du temps est dans ce cas un véritable progrès. Évidemment les liaisons entre les régions profitent généralement au développement de celles-ci. À ceci près que là encore, ce ne sont pas les marchandises qui circulent, mais essentiellement les hommes. Qu’en est-il des TER ? Pourquoi cette liaison ultra rapide entre Bruxelles et Marseille ? Alors qu’il n’y a toujours pas de radiales dans la région parisienne. Et si l’on avait investi dans les trains auto (de moins en moins fréquents on le sait), dans le ferroutage, dans des dessertes plus nombreuses, mêmes peu rentables, alors qu’on en supprime ?
Politique de prestige, certainement plus satisfaisante pour nos ingénieurs issus souvent de Polytechnique, que de travailler simplement à l’amélioration des transports pour la population dans son ensemble. Lobby des ingénieurs des Grandes Écoles qui existe également à l’EDF, particulièrement efficace quand il s’agissait d’opter pour le tout nucléaire.
Le manque de pragmatisme est un défaut très français. Mais qu’en est-il des autres pays ? Les Américains pourtant connus pour cette qualité ont eu également une poussée de fièvre de prestige en allant sur la Lune. Un rêve de l’Humanité. Faut-il les en blâmer ? En effet, les retombées techniques et scientifiques sont incontestables. On peut se réjouir également que l’avion permette de faire parvenir très rapidement des organes que l’on destine à être greffés.
Quand faut-il accepter les inconvénients que procurent les progrès techniques et scientifiques eu égard à ses avantages. Dans cette course au mieux être, petit à petit, les inégalités se sont forgées. L’homme social veut satisfaire non plus des besoins essentiels, mais des désirs qui se sont transformés en nouveaux besoins artificiels, pour une partie au moins des populations. Cette partie chanceuse de l’humanité s’est habituée à la facilité. Ceux qui l’ont compris, ont flatté cette tendance devenue en somme une seconde nature. C’est ainsi qu’on a vu la période d’industrialisation permettre à certains de prendre un pouvoir économique qui finit par échapper aux gouvernants, notablement influencés par les multinationales et groupes de pression catégoriels.
Forts de leurs positions, de leurs moyens, ces derniers deviennent incontournables. D’où le blocage de nos sociétés dans un conservatisme de fait quels que soient les Partis au pouvoir (voir plus bas ch. 14 EXERCICES DE SOUVERAINETÉ).
Ce phénomène conduisant à une société inégalitaire est connu. Il peut donner lieu malheureusement à des excès de la part d’hommes politiques qui trouvent des boucs émissaires aux revendications populaires, et un prétexte à établir leur pouvoir sur le populisme. La bête immonde est encore tapie et n’attend qu’un retour de ces crises économiques pour fomenter des guerres et resurgir.
C’est pourquoi il faut absolument, revenir à des bases économiques saines, changer le système économico politique qui est celui des pays occidentaux actuels. Mais nous dira-t-on, si l’on stoppe la fuite en avant du progrès matériel malgré ses dérives connues, si l’on arrête la croissance, on va bloquer la production des biens devenus structurellement indispensables, que nous fournit le marché libre et non faussé actuel. C’est-à-dire accentuer le nombre des chômeurs, ce qui va déboucher sur des graves crises sociales telles que celles qu’on vient d’évoquer.
L’exemple le plus typique de production nocive, et la plus spectaculaire, est celle de l’automobile. Ce qui a été la « locomotive » d’un certain progrès social, celui des 30 glorieuses en particulier, devient désormais la source des graves atteintes à la vie sur terre.
Le Fordisme a été une solution pendant un certain temps pour engager un processus de prospérité matérielle. « Plus on paye mes ouvriers a dit Ford, plus ils vont pouvoir acheter les automobiles qu’ils produisent ». Raisonnement simpliste, pris à la lettre par les industriels de tous horizons, mais insuffisant car il aurait fallu commencer par augmenter considérablement les salaires des ouvriers de Ford pour qu’ils puissent mettre de l’argent de côté, comme on disait à cette époque, pour acheter l’automobile de leurs rêves qu’ils produisaient. Malgré tout le principe a été efficace au début de l’industrialisation de l’automobile, car pour ne pas attendre que ces ouvriers aient réalisé suffisamment d’économies pour en avoir les moyens, on leur a fait crédit. En créant ainsi une demande artificielle (tout et tout de suite), ils faisaient d’une pierre deux coups, engranger des bénéfices par la vente en grande quantité de leur production, diminuant ainsi le prix de revient par des économies d’échelle, et offrir aux financiers et banquiers des moyens d’accroître leurs bénéfices par les prêts consentis.
Ce phénomène devenu malsain au fil du temps, instaurait la société de consommation. Par chance, ou par manque de chance selon les points de vue, la production en grande série de ces automobiles, a été surtout possible dans la mesure où la source d’énergie pour les faire fonctionner, le pétrole, donc, était devenu bon marché et progressivement très abondant.
Effet pervers de l’accroissement de la consommation qui peut devenir salutaire par ses propres excès devenus maintenant visibles, dans la mesure où, plus on produira, plus on arrivera à diminuer les possibilités d’usage, à cause de la limite des réserves pétrolières.
On peut croire qu’il suffirait d’attendre que ces limites soient atteintes, pour que les choses se rétablissent d’elles mêmes. Un pétrole de plus en plus cher ralentira les achats. Mais quand ? En attendant on aura augmenté les catastrophes écologiques. Pour les mêmes raisons écologiques, il n’est plus possible de laisser faire, laisser passer, comme la loi de marchés, entérinée par l’OMC, y oblige. La question de « l’homo-naturalis » opposé à « l’homo-aeconomicus » est maintenant posée clairement. Mais doit-on, ou peut-on, revenir à l’économie sage du passé sans prendre le risque d’un écroulement de pans entiers de l’industrie qui génèreraient des crises sociales graves ?
Supposons en effet que nos gouvernants, et en particuliers, ceux des U.S.A, qui sont on le sait le plus souvent considérés comme le principal pays responsable de la situation actuelle, décident de taxer progressivement les voitures les plus puissantes. Rappelons l’époque de la vignette qui taxait ainsi en France (soi-disant pour les vieux) tous les automobilistes. Pour les américains, taxer maintenant l’essence, encore très bon marché chez eux par rapport aux pays européens, serait aussi une solution. Taxer, toujours taxer est un défaut bien français qui est une solution de facilité.
Cette méthode, dont l’application est décrétée en mai 2006, est inefficace (sauf à faire rentrer un peu d’argent dans les caisses de l’Etat). Pour dissuader les futurs acheteurs de grosses voitures, il faut que la taxe soit importante, et dans ce cas cela va diminuer effectivement la vente de ce type de voitures. Raréfier la demande de cette façon entraîne aussitôt le déclin de la branche automobile concernée. Les licenciements vont évidemment se précipiter. On commence d’ailleurs à le voir avec Ford et General Motor. Les solutions sont classiques : on délocalise dans les pays où la demande est forte et la main-d’œuvre bon marché (Chine, etc.) On ne fait que déplacer le problème. Du point de vue des financiers, c’est la solution naturelle, celle qui existe depuis longtemps, à une échelle auparavant plus faible, chaque fois que, pour augmenter la production, on a ouvert les frontières pour accentuer les échanges. Certains y perdent, d’autres y gagnent, etc. ceci depuis la fin de l’octroi, jusqu’au marché commun Européen, et maintenant la mondialisation de l’OMC.
Beaucoup vont se résigner -on n’y peut rien, c’est la loi des plus forts- qui est en fait la pire des attitudes. Si l’Etat et les industriels ont tout à y gagner, une partie de la population a tout à perdre. C’est pourquoi, nous proposons de prendre le problème à l’envers. La solution que nous préconisons suppose que les gouvernants prennent des mesures aussi nouvelles que courageuses qui vont paraître comme théoriques et quasi impossibles à réaliser tant elles vont dans une direction inattendue. Mais elles ont leur logique.
Supposons en effet, que les gouvernants décident de subventionner les industriels à condition qu’ils augmentent considérablement le prix de leurs voitures, et ceci d’autant qu’elles sont les plus gourmandes en essence. Comment ? Diront certains, encore aider les patrons !
Le résultat pour la consommation revient à ce qui a été dit précédemment, c’est-à-dire à accentuer ou enclencher la baisse importante des achats. Mais contrairement à la première hypothèse, les industriels conservent leur bénéfice par l’augmentation des prix et les subventions. Alors que dans le cas des délocalisations, l’Etat perd les taxes habituelles par la diminution du chiffre d’affaires et des bénéfices, il perçoit le même montant des impôts (TVA en Europe). Le chômage évité, compense les pertes de taxes sur l’essence non consommée. Certes nous entrons dans un processus d’entente sur les prix, mais pour entrer dans un cercle vertueux, donc non condamnable. Exemple d’une concurrence (sur les prix) qu’il faut fausser !
Les employés sont maintenus dans l’entreprise car les industriels conservent, on l’a dit, leur bénéfice tels qu’il existait précédemment. En revanche les chaînes tournent plus lentement, les mêmes ouvriers ont plus de temps, lequel peut d’ailleurs leur être rétrocédé Temps consacré aux loisirs et à une meilleure vie accentuée par la faible cadence de la production des modèles les plus puissants.
Les subventions vont servir à la recherche, à la mise au point et à la fabrication d’autres automobiles, électriques ou autres, cette fois moins consommatrices d’énergie (elles vont moins vite et moins loin) et moins polluantes. Bien entendu le système devra être étendu aux sous-traitants, et imposé dans tout le secteur automobile, en concertation avec les constructeurs européens (dans un premier temps) pour ne pas pénaliser un constructeur plus qu’un autre en exacerbant la concurrence.
Ce ne serait pas la première fois que l’Etat, du moins en France, sera intervenu dans l’industrie automobile, si l’on se réfère à la période où il a subventionné la reprise-destruction des voitures les plus anciennes. Mais c’était pour relancer la production des constructeurs alarmés par la baisse de leur vente. À souligner que l’apparition des robots sur la pression de l’industrie automobile japonaise, dans la mesure où la cadence de fabrication rendait ses voitures ultra compétitives, permettait de prévoir une offre considérable face à une demande faible. La productivité due au progrès technique devenait un argument de chantage à l’emploi, prétexte au maintien de ce dernier.
C’est ce cercle vicieux, gain de productivité pour atteindre une croissance économique dogmatisée, qu’il faut maintenant rompre, avec l’enchaînement catastrophique prévisible vers un accroissement du chômage et des inégalités.
Pour corollaire indispensable, le crédit à la consommation, particulièrement celui des achats automobiles, devrait en même temps augmenter en taux et baisser en durée de façon sensible. Les banques n’y perdraient rien. Simple calcul comptable. On voit qu’il s’agit simplement d’un retour purement financier (c’est le levier le plus simple et le plus efficace) à la situation précédant l’envol de la société de consommation.
On était dans les années 70 en période de quasi plein emploi, la croissance était normale L’objectif est désormais l’inverse, celui de retrouver une économie saine sans bouleversement social sans croissance inutile. Inutile, car de nombreux économistes sont d’accord pour estimer que la croissance dans le contexte actuel, contrairement à ce que disent les gouvernants, n’est pas synonyme de création d’emploi,
Il va sans dire que cette méthode doit être rendue obligatoire partout où les besoins énergétiques sont les plus forts. Mesures qui, si elles sont appliquées, redonneront, sans revenir entièrement à un passé révolu, le goût de vivre sainement à un rythme redevenu naturel, sans que personne ne perde, sauf si l’on considère que ne plus perdre son temps et son argent dans les embouteillages, ou même sa vie sur les routes devenues praticables, est un inconvénient majeur ?
Seuls les frustrés de la vitesse (en légère régression), et de la puissance, c’est-à-dire le plus souvent les hommes, vont se plaindre. Les femmes seront en revanche satisfaites de voir ces hommes plus disponibles, mêmes s’ils consacrent davantage leurs loisirs au foot au cinéma ou à la télé !
Quant aux industriels, ils retrouveront une époque où la concurrence se fera plus souvent sur la qualité que sur la quantité et les prix, où ils pourront consacrer leurs bénéfices à l’amélioration des modèles. Les chaînes de fabrication des grosses cylindrées s’amortiront sur un plus long terme, source encore supplémentaire de bénéfice ! Moralité : quand les hommes seront redevenus raisonnables, ils pourront continuer à vivre encore des siècles sur cette petite planète qu’est la terre.
Resterait la difficulté de la mise en place de ces mesures, car le consommateur, dont le civisme n’est pas toujours plus fort que l’intérêt financier, s’il est averti, se précipitera dans des achats intempestifs. C’est donc par surprise qu’il faudra opérer. Pour faire accepter cette mesure d’intérêt national dans un premier temps, et international par la suite, il faudra multiplier les réunions et manifestations publiques.
--- fin de citation Louis Peretz de Manosque ---