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Auteur Sujet: Bayrou, Sarko, Ségo: quelle recherche scientifique ?  (Lu 1606 fois)

JacquesL

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Bayrou, Sarko, Ségo: quelle recherche scientifique ?
« le: 06 mars 2007, 03:41:04 pm »
Voir le blog de Philippe Pouletty :

Bayrou, Sarko, Ségo: quelle recherche scientifique ?
http://philippepouletty.blogs.nouvelobs.com/archive/2007/02/24/bayrou-sarko-sego-quelle-recherche-scientifique.html

Citation de: Pouletty
Nos trois présidentiables s’accordent sur le rôle essentiel de la recherche scientifique pour l’avenir de la France et de l’Europe et sur l’augmentation des budgets. Mais ils sont peu diserts, sauf encore timidement Messieurs Sarkozy et Bayrou sur les réformes structurelles nécessaires. Compétitivité et croissance dépendent de la capacité de nos universités et instituts de recherche à générer de grandes avancées scientifiques et technologiques et de nos PME technologiques à devenir des Google et des Amgen. La recherche universitaire française est devenue, sauf en mathématiques et peut-être encore en physique, de niveau international insuffisant. Malgré des moyens financiers non négligeables, cette médiocrité relative est démontrée à travers plusieurs index convergents: qualité des articles scientifiques, brevets, prix Nobel, essaimage de PME innovantes, attractivité vis à vis des meilleurs doctorants et chercheurs étrangers, collaborations avec les grands groupes industriels... Notre dernier prix Nobel de Médecine date de plus de 25 ans, l'Institut Pasteur n'a pas eu de prix Nobel depuis 41 ans quand le petit Institut Scripps de San Diego a eu 2 prix Nobel en 5 ans ! Les grandes entreprises technologiques mondiales choisissent plutôt Boston, Oxford, la silicon Valley pour implanter leurs centres de recherche près des meilleures universités mondiales qui concentrent les talents, la "niak" et les moyens. L'université de Stanford a eu 40 fois plus de revenus de brevets et de plus values de start up que l'Inserm en 2005 par euro dépensé en recherche ! Le ministre François Goulard préfère encore critiquer les baromètres de son collègue Thierry Breton plutôt que de reconnaître que les vents de la recherche soufflent fort vers l'Ouest et le Nord. Les Scandinaves, Britanniques, Allemands, Suisses, Américains, font mieux, mais c'est réversible.

Le cloisonnement excessif entre disciplines scientifiques (si 10 biologistes discutent des bioénergies, ce sera moins productif que d'avoir 2 biologistes, 2 chimistes, 2 physiciens, 2 mathématiciens), l'orientation par les grandes écoles des meilleurs "cerveaux" vers des filières non scientifiques (cabinets ministériels, management), la rigidité des organismes de recherche qui décourage les meilleurs et protège les moins bons, la faible émulation entre universités mal gouvernées et l'absence de sélection, le statut stérilisant d'enseignant-chercheurs dont seuls une minorité fait de la recherche, le faible brassage et caractère trop franco-français des laboratoires, la démagogie anti-scientifique des groupies du principe de précaution expliquent, avec des budgets insuffisants, cette glissade initiée il y a 30 ans.

Le nouveau gouvernement aura le choix entre saupoudrer uniformément les crédits et les postes, mettre sur pieds une réforme « fleuve » technocratique et se concentrer sur un tout petit nombre de paramètres structurants pour laisser ensuite la loi de la « sélection naturelle » opérer. C'est cette troisième voie qui me semble la meilleure.

Quatre actions conjointes aboutiraient à une recherche française dynamique et excellente:
1. Faire de l'agence nationale de la recherche (ANR) le puissant vecteur d'évaluation et de financement sur projets de la recherche scientifique;
2. Donner aux directeurs d'organismes de recherche et aux présidents d'universités un véritable pouvoir de décision;
3. Ouvrir la grille de rémunération et d'intéressement des chercheurs;
4. Financer deux ou trois grands campus transdisciplinaires à vocation internationale.

1. L'ANR, vecteur de la dynamisation et de la réforme en profondeur. L'ANR a introduit timidement le financement sur projet dans la recherche française. Tout chercheur est libre de proposer un projet de recherche fondamentale ou finalisée à l'ANR. Les projets sont évalués par des pairs (autres scientifiques, notamment étrangers, de haut niveau). Seuls les meilleurs projets sont financés. Ce système est le mécanisme dominant du financement de la recherche académique aux au Royaume Uni, aux USA, et de façon croissante au Canada, en Irlande, en Suisse et dans les pays scandinaves. C'est le meilleur mécanisme de financement (par rapport au désastreux système français de financement direct et rigide des organismes et des universités), de sélection des meilleurs projets et des meilleurs chercheurs. Les chercheurs sont ainsi soumis à l'émulation de l'évaluation et du financement conditionné à l'excellence. Cependant l'ANR reste beaucoup trop dépendante du ministère de la recherche et insuffisamment dotée, ce qui aboutit à saupoudrer de petits financements sur projets. L'ANR doit devenir une grande agence de moyens indépendante pour laquelle l'Etat se contente de définir les grandes orientations scientifiques, s'assure de la bonne gouvernance au standard international, définit le budget, évalue l'impact sur les index d'excellence des organismes et des universités. Plutôt que de ne faire de l'ANR qu'une « béquille » de la recherche française, il faut en faire le levier principal de redistribution des crédits de la recherche. Aujourd’hui, l'ANR représente moins de 6% des crédits de recherche publique, il faudrait qu’elle passe à 40% à 50% en 5 ans, en faisant transiter par l'ANR une partie des dépenses de recherche aujourd'hui directement allouées aux organismes et universités et en augmentant la dépense de recherche publique totale de 15 à 20% par an. En rendant compétitive et transparente l'attribution des crédits de recherche, le gouvernement provoquerait un changement de comportement et une réforme d'ampleur de la recherche académique française. Ceux qui se réformeront deviendront compétitifs. Les autres péricliteront.

2. Du pourvoir aux directeurs d'organisme et aux présidents d'université. Aujourd’hui le directeur de l'Inserm ou du CNRS, le président de l'université Pierre et Marie Curie ou de l'université de Strasbourg n'ont que peu de pouvoir de décision. Leur nomination ou leur élection n’obéit pas aux seuls critères de compétence et d’expérience. Ils doivent acquérir un vrai pouvoir de management (recrutements, rémunérations et carrières, sélection des étudiants, politique de recherche, relations industrielles, formation-enseignement, relations internationales...) appuyé par un conseil d'administration international, compétent, indépendant, respecté. Fort de ce pouvoir et soumis à l'incitation de l'ANR pour établir l'excellence, les organismes et universités se réformeront rapidement de l'intérieur, sans que le gouvernement soit exposé à chaque soubresaut ou décision.

3. Ouvrir les carrières. Les meilleurs chercheurs français, l'élite de la nation, sont aujourd'hui rémunérés de manière honteuse. A l'inverse, certains chercheurs qui ont oublié qu'être fonctionnaire au CNRS ou à l'université impliquait un devoir d'excellence et de productivité scientifique sont trop rémunérés. En ouvrant les grilles de rémunération et en offrant des alternatives au statut de fonctionnaire, avec un choix volontaire entre fonction publique statutaire et contrat de droit privé (fondation) au-dessus d'un seuil de 2 fois la rémunération de fonctionnaire notre recherche vivra mieux. La rémunération prendra en compte l'excellence démontrée, sur des critères objectifs (nombre de projets financés par l'ANR, index d'excellence en bibliométrie, brevets, contrats industriels, attractivité sur les chercheurs et étudiants étrangers...). La France redeviendra attractive pour les étudiants et les chercheurs et leur offrira des moyens de recruter et de fonctionner. Ils choisiront la France plutôt que les Etats Unis ou Singapour.

4. Financer deux ou trois grands campus à vocation internationale: l’institut Européen de Technologie de Paris et l’institut Européen de Technologie de Grenoble. Pendant que les organismes et les universités se réforment, ce qui sera lent, il est urgent de faire à Paris et à Grenoble deux grands campus très attractifs pour les meilleurs chercheurs et les meilleurs étudiants du monde entier, tout en favorisant recherche fondamentale, la transdisciplinarité et les ruptures technologiques. Ces deux instituts auront une structure de fondation d’utilité publique, un véritable campus avec bâtiments de recherche futuristes favorisant la transdisciplinarité dans un environnement socialement attractif pour les chercheurs et leurs familles (crèches intégrées, écoles internationales…). Ils recruteront dans le monde entier 100 à 200 leaders scientifiques, au « prix du marché » international, qui attireront ensuite les meilleurs jeunes chercheurs et les financements sur projets, les contrats privés. Ils conduiront une politique duale de recherche fondamentale et de création de jeunes entreprises technologiques de rupture.

Avec ces quatre réformes structurantes et en évitant de s'immiscer dans le « détail qui tue la réforme d'ampleur », le prochain gouvernement pourrait redonner à la France son rang dans la course mondiale à la recherche et à l'innovation. Cette politique de la recherche publique devrait s'accompagner d'une grande orientation de l'épargne vers les PME innovantes : en obligeant notamment l'assurance vie et les fonds de retraite PERP à investir au moins 5% de leurs actifs dans le capital risque et le marché boursier technologique. Une réforme de l'agence pour l'innovation industrielle devrait l'accompagner pour consacrer la majorité de ses avances remboursables aux PME et aux consortiums de PME innovantes et non aux seuls grands groupes "amis".

C’est 1% à 2% de croissance qui pourraient en résulter.
« Modifié: 09 mars 2007, 02:07:23 am par Jacques »