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Auteur Sujet: Quand le pouvoir de la presse et de son argent est du pouvoir sale :  (Lu 944 fois)

JacquesL

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Quand le pouvoir de la presse et de son argent est du pouvoir sale :

Citer
Bonjour,
je me permets de copier 'in extenso' ci apres document bien ecrit presentant une impressionnante lecon de pilotage 'aux fesses'... Dommage que ce genre de pilotes transportent du fret... en ma simple condition de pax moyen, je me sentirais plutot rassuré de voler avec eux... J'ai compris que ce cas est presenté lors de formation chez airbus.
Bonne lecture


22 Novembre 2003, un A 300 modifié « Tout Cargo » exploité par la Compagnie DHL (indicatif OO DLL) décolle de Bagdad à destination de Bahreïn. C'est un « bon vieux B 4 », numéro de série 94, initialement livré à la Compagnie MAS.
A son bord, trois membres d'équipage, Eric le Commandant de bord, son co-pilote Steve, et l'Officier Mécanicien Navigant Mario. Ils sont prêts pour cette mission de routine, simple transport de courrier.
La charge transportée est  modeste  L'étape est courte, le temps est dégagé et l'avion ne pèse que 220 000 livres, bien en dessous de la masse maximale autorisée pour l'atterrissage.
Rien ne leur indique qu'ils vont vivre leur « Heure de Vérité » : celle à laquelle les hommes d'action sont confrontés, un jour ou l'autre, celle où se révèlent les vrais caractères, loin des simagrées médiatiques. L'heure que l'on redoute et que l'on espère, car le verdict est sans appel.

Aligné sur la 15 Gauche, les freins sont lâchés. Les deux moteurs poussent rapidement l'avion vers un envol sans problème, en configuration « Becs seuls »
En application de la procédure préconisée par la Compagnie pour s'éloigner au plus vite du sol, les becs sont rentrés à très basse altitude et l'avion installé en montée à pente maximale à la vitesse de 215 nouds.

Le calme est de courte durée. Vers 8000 pieds un choc ébranle l'avion, associé en quelques secondes à une succession d'alarmes sonores. Mario annonce la perte des circuits hydrauliques vert et jaune, et vingt secondes plus tard le circuit bleu perd à son tour sa pression.
L'avion est désormais livré à lui-même. Manche et palonnier sont sans effet. Les gouvernes, privées de leur muscle hydraulique, s'alignent dans le lit du vent.

La configuration est figée :

-    becs et volets ne peuvent plus sortir,
-    les spoilers ne sont plus commandés et s'alignent eux aussi dans le lit du vent local.
-    la position de l'empennage horizontal n'est plus modifiable: Elle est et restera en fait gelée à la valeur qui était nécessaire pour équilibrer l'avion à 215 nouds, à la poussée de montée.

La perte hydraulique totale est rapidement diagnostiquée. L'état d'urgence est signalé par Steve au Contrôleur ATC. L'équipage est avisé de l'existence d'un feu externe au niveau de la voilure gauche. L'avion continue sa montée et sa stabilité l'entraîne en un virage d'inclinaison modérée à gauche. Une tension extrême règne dans le cockpit, jusqu'à ce que le Commandant de Bord annonce qu'il pense contrôler l'assiette longitudinale en jouant sur les moteurs.

Commence alors une période d'apprentissage pendant laquelle Eric, suivi par Steve, découvre comment maîtriser la pente en modulant la poussée des moteurs. Au début les actions sur les manettes sont amples et uniquement symétriques, le virage à gauche est donc maintenu et l'avion décrit un 360° large et irrégulier.
L'équipage constate qu'il peut certes stopper la montée en réduisant, mais que cette diminution de poussée entraîne aussi l'augmentation de la vitesse de vol : il faudra « faire avec » ce paradoxe : Il résulte du couple piqueur que le blocage du plan horizontal ne peut équilibrer.

Eric demande avec insistance la sortie du train d'atterrissage « à la manivelle du dernier secours » alors que la vitesse excède déjà 270 nouds, valeur maximale autorisée pour cette manouvre. Le train sort bruyamment et fournit la traînée additionnelle qui, seule, peut ramener la vitesse autour de 210 nouds.
Maintenant que l'avion est contrôlé en tangage autour du vol horizontal et que la vitesse est redevenue compatible avec un atterrissage, Eric apprend à maîtriser la direction du vol.

Car l'explosion du missile a arraché une bonne partie de l'aile gauche, entre le bord de fuite et l'âme du longeron arrière qui servait de cloison au réservoir externe : 3500 kilos de  carburant s'échappent rapidement en s'enflammant.

Entre aile gauche et aile droite existe alors une double dissymétrie (de forme et de masse) qui entraîne un « équilibre » en virage permanent à gauche. Il faut bien en sortir pour revenir vers le terrain.

La manouvre dissymétrique des manettes agit sur l'inclinaison. Quand le moteur gauche est seul accéléré, les ailes reviennent vers l'horizontale, de même si le moteur droit seul est réduit, mais ce n'est pas si facile :
-   si la réponse aux variations de poussée apparaît rapide en tangage, la réponse en roulis est quelque peu décalée (le roulis résulte en fait du dérapage induit par la dissymétrie de poussée et il faut le temps de l'installer)
-  comme l'aile gauche est endommagée, il faut trouver la dissymétrie de poussée qui compense la dissymétrie de portance, et la maintenir pendant les modulations de  poussée qui contrôlent la pente. Plus facile à dire qu'à faire !

Au total la situation est donc encore plus délicate que celle du DC 10 de Sioux City, car dans ce dernier cas la perte totale hydraulique résultait de l'explosion du moteur central, et laissait certes la difficulté de contrôler la pente et l'inclinaison par le pilotage des seuls moteurs sous voilure, mais au moins à partir d'un avion dont les ailes « portaient » symétriquement !

Toujours est-il qu'Eric apprend assez rapidement cette gymnastique particulière des manettes de gaz et, après quelques excursions un peu inquiétantes de l'inclinaison au-delà de 30°,  le moral remonte. Maintenant il peut envisager de « naviguer » vers le terrain qu'il a perdu de vue dans ses évolutions d'apprentissage.
Steve prend en charge la navigation. Il faut une longue finale, au moins 20 nautiques. Après un deuxième virage de 360° par la gauche, suivi d'un segment rectiligne d'éloignement, Eric engage un virage à droite pour revenir vers la 33 R, la plus longue des deux pistes de Bagdad.
Il faut maintenant établir le plan de descente.  Là aussi ce n'est pas commode : La pente affichée par la valeur moyenne de la poussée n'est pas simple à interpréter, car tout se passe dans l'oscillation phugoïde.  C'est donc une pente moyenne qu'il faut visualiser tout en maintenant la direction par le jeu dissymétrique des moteurs : pas évident quand l'assiette varie entre O ° et 5° avec une période proche de la minute !

Comme un bonheur ne vient jamais seul, la turbulence associée à un vent de 20 noeuds du 290° (composante travers gauche) excite les oscillations naturelles et pour faire bonne mesure les alarmes GPWS retentissent à répétition.

L'alignement est difficile, Eric adapte alors ses ambitions à la faiblesse des moyens dont il dispose :

     -    La piste 33 L semble plus près du cap moyen, va pour la gauche.
-    La pente moyenne semble faible, tant pis si on touche avant la piste
Il se concentre sur l'essentiel, garder un avion sous contrôle et rejoindre le terrain, là où il y a des pompiers pour maîtriser le feu de l'aile gauche.

Steve aide par ses commentaires efficaces, annonce distances et altitudes. Il rappelle qu'il ne faut pas réduire à fond les deux moteurs, sinon la poussée symétrisée au ralenti induirait un virage à gauche particulièrement indésirable dans les derniers pieds avant le contact avec le sol.

Mario surveille le carburant dans l'aile gauche endommagée. Il est vital que le moteur gauche reste en fonctionnement.

Il se tient donc prêt à ouvrir l'intercommunication si le réservoir 1 se vide à son tour, mais pas trop tôt, car on soumettrait alors le carburant contenu dans l'aile droite à la fuite du côté gauche !

La tension remonte avec la décroissance de l'altitude. A 250 pieds l'assiette longitudinale, toujours lentement oscillante, glisse vers les valeurs négatives ce qui est très inquiétant si près du sol. Elle est relancée vers le cabré par une remise de gaz franche sur les deux moteurs.

Vers 100 pieds, l'avion pointe vers l'entrée de piste, mais avec un  cap inférieur de 10° à l'orientation de la 33. Eric commande alors sa dernière correction de contrôle latéral, en réduisant le moteur droit seulement. L'avion s'incline vers la droite, et l'angle de divergence commence à diminuer, mais grâce à la poussée élevée maintenue sur le moteur gauche, l'avion ne plonge pas vers le sol dans les derniers pieds.

Vingt cinq longues minutes après l'impact du missile, l'A 300 a donc bel et bien été posé sur la piste 33 L et intact :

-    Avec une assiette  longitudinale positive,
-    Une vitesse verticale modérée (inférieure en tous cas aux 10 pieds par seconde pour lequel le train est calculé !)
-    Une inclinaison de 10° à droite et un cap divergent sur la gauche de l'axe de la piste d'environ 8°

Sans aucune énergie hydraulique, C'est une « première » et un véritable exploit.

Toujours privé de moyen direct de contrôle de la direction, l'avion quitte ensuite la piste très rapidement.
Les moteurs sont maintenant réduits et passés en pleine reverse. Le sol sablonneux fournit un complément non négligeable au freinage.

Au total, ce freinage est performant (près de 0.5 g de décélération) et,  en dépit de la vitesse élevée au touché, l'avion s'immobilise après une course de l'ordre du kilomètre, soulevant derrière lui un panache de sable impressionnant.

L'avion est finalement stoppé  le nez dans la clôture de l'aéroport. Il ne reste plus qu'à quitter le bord par le toboggan droit . et poser pour la photo souvenir.

A l'heure où les pilotes sont si souvent montrés du doigt (C'est bien connu, 70% des accidents aériens mettent en jeu la responsabilité de l'équipage) n'est-il pas réconfortant de voir une démonstration aussi percutante de l'adaptabilité des hommes pour dominer des situations aussi improbables ?

Si le Transport Aérien est aussi sûr, si toutes causes confondues, il n'y a plus en gros qu'un accident pour 10 millions d'heures de vol (exprimé en kilomètres par passager transporté la performance est vertigineuse, surtout si on la compare au Transport Routier !), c'est que les avions sont conçus pour résister à de nombreuses pannes et combinaisons de pannes (En pratique, pour être « négligée » dans les règles de conception, une panne doit avoir une probabilité d'existence plus faible qu'une occurrence pour 1 milliard d'heures de vol !)

Mais ces « Analyses de Sécurité » qui mènent aux redondances caractéristiques des véhicules Aériens ne prennent pas en compte la folie des hommes et aucun avion n'est « certifié » à l'épreuve des tirs de missiles et autres formes d'attentats.

Alors, que trois hommes, face à une situation réputée incontrôlable, se tirent  d'affaire et sauvent un avion condamné,  par ce qu'ils ont compris et senti, analysé, et travaillé en équipe en surmontant un énorme stress, et surtout qu'ils aient su faire la part des choses et gérer efficacement les priorités n'est-ce pas rassurant ?

Cette aventure, si heureusement conclue, doit être portée à la connaissance de la Communauté des Pilotes, comme l'avait été en son temps le vol du DC 10 à l'issue malheureusement plus tragique : C'est une belle leçon pour la « Sécurité des Vols » il ne faut pas la laisser se perdre.

Alors, en guise de conclusion, je dirai comme dans les Bulletins de Sécurité des Vols de l'USAF,  bien connus de tous les pilotes militaires de l'OTAN :

                 WELL DONE
Eric, Steve, Mario

Ou plus simplement, Chapeau tous les 3, vous êtes de vrais Aviateurs, avec un grand A.
Vous avez su tirer le meilleur de votre « Heure de Vérité ».

Citer
Le truc incroyable, c' est que les tirs ont été filmés du sol par des journalistes :
http://www.iasa-intl.com/folders/belfast/241103/index.html

Si la communauté aero a largement salué l' exploit,
DHL s' est montré bien plus avare.

Patp

Citer
Il se pourrait donc que l'A300 ait été visé uniquement pour fournir des images aux journaleux accompagnant ce groupe de terroristes...



http://www.iasa-intl.com/folders/belfast/241103/6crims.html









http://www.iasa-intl.com/folders/belfast/241103/6crims-8.html

Citer
Avec des missiles, je ne connaissais pas. Par contre, des mecs qui ont bidonné à Beyrouth, avec des accrochages le long de la Ligne verte à moins de 1000 dollars, munitions comprises, il y en a eu plein la presse et plein les 20 heures.

Dans ce qui est devenu ma commune depuis, dans les années 80, des jeunes ont été filmés par des journalistes qui les avaient payés un Pascal (un billet de 500 F) pour incendier une voiture.

Quand le pouvoir de la presse et de son argent est du pouvoir sale...


Les citations proviennent toutes de Usenet, du groupe fr.rec.aviation.
« Modifié: 18 août 2011, 01:33:35 pm par JacquesL »