Le Blog "Langue sauce piquante" piquait ce jour là la captation des largesses de Liliane Bettancourt par le sieur François-Marie Banier :
Mme Bettencourt est très banier percé.
L’affaire Bettencourt est très révélatrice des liens entre la bourgeoisie et le personnel politique (qui n’est pas très loin du petit personnel). Elle a commencé par une querelle familiale classique*. Et nous percevons, quand il est question dans la presse du protagoniste F.-M. Banier, un net sentiment d’envie et de jalousie, et même une certaine vulgarité – on pense notamment au parallèle avec le film L’Argent de la vieille. Au vu des sommes invraisemblables qui sont en jeu (entre un milliard et un milliard et demi, avec la fameuse île des Seychelles – La Possibilité d’une île à 500 millions !), il faut reconnaître que nous avons affaire à un maestro, à un aventurier de haute volée qui ne peut se comparer qu’au grand Casanova.
Le Vénitien avait aussi eu sa Liliane, en la personne de la richissime marquise d’Urfé, entichée de spiritisme et de Grand Œuvre, et qui commerçait volontiers, surtout nuitamment, avec sylphes et génies. Elle désirait se réincarner en homme, et s’était persuadée que Casanova, qui avait aussi une réputation dans les sciences occultes, pourrait l’aider dans cette transmutation. Voici ce qu’il déclare dans ses Mémoires après sa première rencontre avec la marquise :
“Secondant ces folles idées de cette dame, il ne me semblait pas de la tromper, car c’était fait, et il était impossible que je parvinsse à la désabuser. Si en vrai honnête homme je lui avais dit que toutes ses idées étaient absurdes, elle ne m’aurait pas cru, ainsi j’ai pris le parti de me laisser aller. Je ne pouvais que me plaire, poursuivant à me laisser croire le plus grand de tous les Rose-Croix, et le plus puissant de tous les hommes, d’une dame alliée à ce qu’il y avait de plus grand en France, et qui d’ailleurs était riche plus encore par son portefeuille que par 80 mille livres de rentes que lui donnait une terre et des maisons qu’elle avait à Paris. Je voyais clairement qu’au besoin elle n’aurait pu me rien refuser, et malgré que je n’eusse formé aucun projet pour m’emparer de ses richesses ni en tout ni en partie, je ne me suis cependant pas senti la force de renoncer à ce pouvoir.”
(Vol. 5, chap. VI.)
Et plus tard :
“Absorbé dans le libertinage, et amoureux de la vie que je menais, je tirais parti de la folie d’une femme qui, n’étant pas trompée par moi, aurait voulu l’être par un autre. Je me donnais la préférence, et en même temps la comédie.”
(Vol. 9, chap. III.)
Tout est dit. Pendant plusieurs années, de 1758 à 1763, il mystifia cette dame déjà âgée, lui soutira moult argent, et organisa régulièrement des mascarades érotico-alchimiques avec elle et des comparses, qu’il décrit avec force détails amusants, pour continuer à la garder en son pouvoir.
La marquise était aussi en procès avec sa progéniture, laquelle réussit finalement à faire écarter Casanova par lettre de cachet. Mme d’Urfé finit d’ailleurs par comprendre la mystification, qui lui fut dévoilée dans les détails par un des comparses de Casanova, lequel voulait lui piquer traîtreusement sa place.
Nous ne savons pas encore comment l’”affaire” Bettencourt va se terminer, mais il faut bien reconnaître audit Banier un savoir-faire casanovien : bravo, l’artiste !
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* comme celle qui agite actuellement la famille Agnelli en Italie, pour des sommes encore plus importantes (2 milliards).
Petite imprécision dans la rédaction :
il ne s'agit que des liens entre la
haute bourgeoisie et le personnel politique.
Quand même pas toute la bourgeoisie...