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Auteur Sujet: Derniers quatuors de Beethoven  (Lu 1377 fois)

JacquesL

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Derniers quatuors de Beethoven
« le: 15 février 2007, 01:31:52 pm »
Vincent C nous a fait l'honneur de nous écrire :

> Bonsoir,
> on m'a déjà dit que la seule chose sur laquelle tout le musicologues
> s'entendent, c'est que les derniers quatuors à cordes de Beethoven étaient
> sans aucun doute la musique la plus ... pure? profonde? jamais composée (si
> je me souviens bien des dires du prof). Nous avons à peine écouté (entendu)
> quelques bouts. Alors quelles sont les particularités de cette musique?
> Sont-ils comparables aux quatuors classiques de Mozart (que je connais un
> peu mieux) ou même aux ensembles de Tchaïvovsky dans le romantique (que je
> connais beaucoup mieux)? Si vous pouviez les prendre en exemple je
> comprendrais très bien ! :o)
>

Rien n'est plus subjectif et personnel que ce genre d'appréciations,
que nous rencontrions en effet sur les pochettes des disques, et en
introduction de nos partitions de poche. Particulièrement
dithyrambique était ainsi l'introduction à la Grande Fugue...

Je pourrais donner mes propres appréciations subjectives. Je parle par
exemple de la fugue initiale et des variations allegretto du 14e
quatuor en ut dièze mineur, à l'adresse
http://forum.aceboard.net/11070-1589-6390-0-aime-j%92aimais.htm

Mais il faut ajouter qu'on avait ce quatuor en microsillon 33 tours
quand j'étais adolescent, par le quatuor Vegh. Années 50.
De même qu'adolescent, j'avais lié partie avec le premier mouvement du
divertimento pour orchestre à cordes de Bartok Bela, dirigé par Ferenc
Fricsai chez DG. Rien que de très lié à la problématique de cet
adolescent-là, dans la répression pro-échec et anti-mâles de cette
famille-là.

Plus tard, dans d'autres contextes, avec d'autres interprétations, la
même magie joue moins : pas les mêmes tempi, pas les mêmes priorités
ni éclairages.
Inversement, les limitations des machines parlantes de l'époque
pouvaient défigurer un passage, voire l'escamoter directement par un
saut d'aiguille systématique (papa n'avait jamais su régler un
antiskating). Les timbales de transition entre le 2e et le 3e
mouvement du Concerto pour Alto, de Bartok, ainsi que les deux accords
finaux, étaient ainsi sacrifiées...
Il arrivait que dans un concerto seul le soliste soit correctement
rendu, et l'orchestre tourné en ridicule par la machine, réduit au
rôle d'aboyeur : "Wouah wouah ! Comme il a bien parlé !"... L'ampli et
le HP s'étouffaient à chaque tutti.

Je déteste les musiques de Bruckner, par exemple, et la plupart des
musiques de Joseph Haydn. Ne pas chercher de musicologie là dedans,
mais dans la formation de ma propre sensibilité.

Depuis, j'ai récouté ces derniers quatuors.
Que ce soit de l'excellente musique, aucun doute. Preuve indirecte :
le canot pneumatique de la traversée de l'Atlantique du naufragé
volontaire, l'Hérétique, est (ou était, compte tenu de l'oxydation
catastrophique du caoutchouc) au musée de la Marine. Alain Bombard
avait emporté peu de livres, mais la partition de poche du 15e
quatuor. Je peux faire confiance à Alain Bombard pour ne pas emporter
de musique médiocre pour traverser l'Atlantique...

Que ce soit "pur, abstrait" ? Je doute que cette légende dorée puisse
résister à l'oreille exercée d'un papa-poule.
Mon fî avait tenté tous les tons, du plus furieux et menaçant "Téter !",
au plus implorant et tout aigu, la langue incurvée en gouttière "Téter ?"...

Depuis longtemps déjà, j'avais mis des paroles sur le scherzo
burlesque du 14e quatuor :
"Dis papa ! Dis maman !
Dis papa et dis maman !
Dis papa ! Dis maman !
Dis papa et dis maman !
Papa ! Maman !
Papa ! Maman !
Papa ! Maman !
Pa pa pa pa pa pa pa pa pa pa pa !
papapamaman !
..."
Etc.

Les variations allegretto, le finale, oui, tout cela est d'un bout à
l'autre de l'appel-maman.
Tout comme mon fî beaucoup plus jeune, l'illustre Ludwig tente tous
les tons, de l'impérieux au plus implorant, dans l'espoir toujours
déçu, d'attirer l'attention et l'affection de sa môman.
Comme il avait énormément de métier et de ténacité, cela méritait bien
de passer à la postérité.
Ludwig était un garçon volontaire, qui savait conclure tous ses finales
par la résolution : "Tu ne veux donc toujours pas t'occuper de moi !
Alors je me débrouillerai tout seul ! J'ai des solutions universelles
pour tous !
"
Alors que Franz Schubert, bien plus dépressif, pouvait conclure ses
cycles de lieder par le désespoir "Je n'ai pas de solutions". Et qu'il
faudra attendre la première guerre mondiale pour entendre des
compositeurs désespérer jusque dans le finale de leurs oeuvres
instrumentales. Comme les finales lents et désespérés du 2 et du 6e
quatuors de Bartok Bela. Comme la dernière musique de Dmitri
Chostakivitch.
Sauf les crocodiliens - qui ont eu une évolution partiellement
convergente -, tous les reptiles sont muets. Au Trias, nos ancêtres
reptiles mammaliens ont commencé de mettre au point, non seulement
l'oreille moyenne que nous avons toujours, mais aussi le système de
communication par signaux sonores entre petits, allaités dans le
terrier, et les adultes parents. Notamment il fallait mettre en place
l'inhibition du cannibalisme, inhibition qui continue de réussir dans
la plupart des cas, et l'appel des fonctions de protection. Appel qui
réussit moins systématiquement. La musique, surtout le chant, héritent
de cette fonction première : l'appel-maman.
« Modifié: 19 mai 2007, 03:57:39 pm par Jacques »