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Auteur Sujet: Grammaire et vocabulaire, deux échecs sanglants.  (Lu 1003 fois)

JacquesL

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Grammaire et vocabulaire, deux échecs sanglants.
« le: 12 novembre 2009, 03:50:13 pm »
pehache-tolai a écrit :
> Et je vois encore moins comment une méthode d'apprentissage de la
> lecture ou une autre pourrait expliquer le niveau catastrophique en
> grammaire.

Outre l'échec sanglant en grammaire, le professeur Bentolila a pointé
aujourd'hui dans le Monde l'autre aspect de l'échec de l'enseignement de
la langue commune : l'extrême appauvrissement du vocabulaire dans les
communautés ghettoïsées.

http://www.lemonde.fr/web/imprimer_element/0,40-0@2-3232,50-1265877,0.html

Citer
Comment peut-on parler d'identité nationale sans prendre l'engagement que le pouvoir linguistique soit équitablement distribué sur notre territoire ? Les inégalité linguistiques que l'on tolère parfois avec complaisance défont notre tissu social et encouragent les communautarismes.

Fadela Amara a jusqu'ici traité avec une coupable désinvolture la terrible insécurité linguistique qui ferme à double tour la porte des ghettos sociaux, excluant une partie de notre jeunesse de la communication sociale. Elle a confondu conformité aux normes et pouvoir de parole : "parler bien" et "parler juste". Elle a la chance, elle, de parler juste même et peut sans dommage se permettre quelques privautés lexicales et syntaxiques qui affichent, pense-t-elle, sa différence. Elle possède, elle, le pouvoir d'imposer à d'autres sa pensée alors que la plupart des jeunes qu'elle défend ont bien du mal à être compris au plus juste de leurs intentions. Elle a rejoint ceux qui, sûrs de leur pouvoir linguistique, balaient le problème d'un revers de main désinvolte : "Chacun parle comme il l'entend, chacun écrit comme il lui chante." La vérité serait ainsi dans le "particularisme identitaire".

Comprenons-nous bien, il ne s'agit pas de défendre ici la beauté immuable de la langue française, il ne s'agit pas de stigmatiser les fautes d'orthographe. Ce dont il s'agit c'est de défendre mordicus le droit de tout citoyen d'expliquer, d'argumenter, de convaincre et aussi de recevoir un discours ou un texte avec autant de bienveillance que de vigilance. Sans ces capacités il n'y a pas d'autonomie, pas d'initiative, pas de résistance, pas d'identité nationale possible.

N'oublions jamais que notre langue doit permettre de rassembler, de transcender les clivages, de guérir les déchirures. Elle ne doit surtout pas annihiler les différences culturelles et sociales, mais elle doit les rendre audibles les unes aux autres ; c'est ainsi qu'elle contribuera à préserver le lien social et à éviter que ce pays ne devienne un conglomérat de groupes imperméables les uns aux autres, prêts à tous les affrontements, à toutes les violences.

Tous ceux qui n'ont jamais eu la chance sociale et culturelle d'être invités aux concerts de la communication élargie n'ont eu que peu de raisons de s'emparer d'instruments linguistiques justes et pertinents. Non parce qu'ils ont été intellectuellement incapables de les utiliser, mais tout simplement parce que, dans le petit périmètre de communication qui leur fut concédé, ces instruments n'avaient pas leur utilité. En d'autres termes, lorsqu'un groupe social est tenu à l'écart des cercles de réflexion collective, des lieux d'influence et des centres de décision, il va "naturellement" se doter de moyens de parole réduits parce qu'ils constituent la réponse linguistique adaptée à la situation culturelle et sociale réduite qui lui est imposée. C'est en effet l'ambition que l'on nous autorise qui règle notre envie et notre capacité de conquérir la langue. Aller chercher par la parole ou par l'écriture l'Autre au plus loin de soi-même est dans notre pays un privilège auquel certains n'ont pas droit ; la marginalisation culturelle et sociale a engendré chez eux une insécurité linguistique que l'école n'a pas réussi à éviter et que les différents organismes sociaux, qui ont pris le relais, ont négligé au profit de petits boulots condamnés à être répétitifs et précaires par la pénurie des mots.

Défendre l'identité nationale c'est d'abord mener le combat pour permettre à chaque citoyen de transmettre à l'Autre sa pensée de la façon la plus juste et la plus précise, et d'ouvrir en retour son intelligence à la pensée de l'autre avec discernement. Un citoyen privé de réel pouvoir linguistique, en difficulté de conceptualisation et d'argumentation, ne pourra pas prendre une distance propice à la réflexion et à l'analyse. Il sera certainement plus perméable à tous les discours sectaires et intégristes qui prétendront lui apporter des réponses simples, immédiates et définitives. Il pourra plus facilement se laisser séduire par tous les stéréotypes qui offrent du monde une vision dichotomique et manichéenne. Il se soumettra plus docilement aux règles les plus rigides et les plus arbitraires pourvu qu'elles lui donnent l'illusion de transcender les insupportables frustrations quotidiennes d'une vie privée de sens. Etre capable de vigilance et de résistance contre toutes les utilisations perverses du langage, être préparé à imposer ses propres discours et ses propres textes en accord avec sa libre pensée, voilà ce qui fonde notre identité nationale, voilà ce qui fait que nous sommes citoyens d'une république laïque et fraternelle.


Alain Bentolila, professeur de linguistique à l'université Paris-V

Il n'est même pas nécessaire d'aller stigmatiser encore une fois nos enfants issus de l'immigration maghrébine pour illustrer. Il suffit de prendre le cinéma américain, et ses flagorneries populistes, façon John Wayne en fin de carrière : à chaque problème, le héros vieillissant et réactionnaire a la réplique universelle, à savoir le poing dans la gueule. Un souci ? Une contrariété ? Poing dans la gueule !
Même pas nécessaire d'être dans un décor Western avec des chevaux, ça marche aussi dans "La taverne de l'irlandais", censé se dérouler en Australie.

Mais Internet, en imposant la distance et l'écrit, est la solution universelle, n'est-ce pas ? Les gens s'adaptent à l'écrit !
Hé bien non, même pas.
Leur grammaire reste calamiteuse, leur compréhension demeure farfelue et très limitée.
Et comme ils n'ont pas de vocabulaire, ils collectionnent et accumulent les icônes. Ils s'imaginent que les icônes remplacent la pensée.

Un exemple ?
Voici une réplique limitée à la répétition en triple exemplaire d'une icône :
Citer
Voilà un exemple de phrase bien mal construite.
Celui qui a une longue expérience des icônes du net, peut finir par reconnaître qu'il s'agit d'un pouce levé, répété trois fois.

Toutefois, cette identification prend plusieurs heures, et exige de revenir plusieurs fois sur le message mystérieux. L'intention du dessinateur est tout sauf évidente : s'agit il d'une grosse bougie cannelée qui est agitée là ? Ou d'une boîte de conserve cannelée, au couvercle levé ? Ce n'est pas le graphisme qui permet de lever le doute, mais une étude sur les moeurs des constructeurs d'icônes du net, et sur la psychologie de ces utilisateurs.

On ne sait pas non plus si l'auteure du message a eu l'intention d'écrire un pluriel, avec trois personnes distinctes levant toutes le pouce, ou une intensité, du genre qu'une seule personne lève le pouce trois fois plus fort, ou encore une répétition, le même personnage levant le coude, oups ! le pouce, trois fois de suite.
On ne sait pas le sujet du verbe. Est-ce Altéa89 qui s'est représentée levant le pouce ? Ou est-ce une communauté ? Et cette communauté inclut-elle Altéa89 ? Le message ne le dit pas.

On n'a pas non plus le moindre idée du destinataire du message : à qui ou à quoi Alté89 lève-t-elle le pouce, ou fait-elle lever le pouce à quelqu'un d'autre ?

On ne sait pas non plus l'objet du levage de pouce. Il semblerait que ce soit une réaction, mais nul ne sait en réaction à quoi (excepté l'auteure du message, dont on espère que elle, elle le sait).

Le fin mot de l'affaire, le contexte invisible dans le message, est que ce groupuscule confus et anxieux se cherchait une identité. Il ne l'a trouvée qu'en négatif : faire la guerre à l'instruction, pour se venger de sa scolarité, là bas au loin et il y a longtemps.

Lien complet :
http://caton-censeur.org/resources/sabrinazeroual/Chez_sabrina_guerre_a_l_instruction.html
« Modifié: 13 novembre 2009, 09:22:27 am par Jacques »